vendredi 14 mars 2014

Souvenirs de Crémieu (Isère) cité médiévale d'un moment de notre enfance ...


La halle de Crémieu (Isère) fidèle à mon souvenir.
Emblème de la cité médiévale, vaste et impressionnante, elle n'a pas changé depuis plus de 500 ans. Mais pour moi, son histoire commence en cette année 1944, où ma famille - grand-mère, mes tante et oncle -  s'installa  à Crémieu durant quelque temps. Mon frère et moi avions alors 7 et 5 ans.
Ce fut une période riche d' événements et d'expériences en tout genre. Depuis une scolarité buissonnière, où j'appris pourtant très tôt à lire, jusqu'aux aventures pittoresques et risquées des enfants hardis que nous étions, mon frère et moi...     
Fort animée les jours de marché, la halle nous appartenait dés que les derniers marchands, leur recette faite, vidaient les lieux. Que de jeux, de cavalcades, d'explosion de liberté, pour les enfants d'une cité encore préservée de l'évolution d'un modernisme castrateur.
Je me souviens de ses ruelles étroites, des chemins qui conduisaient vers la campagne proche, des noyers le long des routes ...

Crémieu, cité médiévale, aujourd'hui

Pourtant, des souvenirs moins glorieux, douloureux, s'attachent à cette époque, où l'enfance entre tout à coup dans le quotidien d'une histoire sombre, dont elle gardera pour toujours la mémoire.
Les FFI avaient libéré Crémieu, les américains la quittaient, et vint l'heure des règlements de compte ...


    Des badauds s'étaient attroupés non loin de la porte de l'église ; j'étais là aussi ; comment étais-je là ? Je ne sais plus. Etais-je venue seule ? C'est tout à fait plausible, tant était grande notre liberté d'action.
La foule curieuse s'abreuvait du spectacle de trois femmes,  honteuses, perdues, recroquevillées sur elles-mêmes ... leur crâne était rasé et portait, peinte en noir, une croix gammée ...
Je comprenais qu'une chose terrible, dont j'ignorais le sens, s'était abattue sur elles ...
J'ai souffert de les voir ainsi, dépouillées de toute dignité, si malheureuses et seules.
C'est sans doute de ce moment que date ma tendance à prendre la défense des causes perdues, parfois même, les plus inexcusables ...

*******    

4 commentaires:

  1. Bonjour,

    poignant récit, qui finit mal....mais si réel. Cette fin avec des femmes au crane rasé m'a été conté par d'autres. Comme quoi on ne badinait pas avec quiconque avait collaboré (à sa manière) avec l'ennemi.
    Reste qee bien souvent, c'était pour nourrir ses enfants, que ces belles avaient fauté.

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. Bonjour,

      Quelles qu'aient été les raisons de leur mise à l'index, ceux qui appliquent de telles méthodes pour "punir" (de quel droit ?) se dégradent autant qu'ils dégradent ces humains victimes d'une époque et de ses diktats. Dans le cas présent, ce pouvait être aussi une histoire sentimentale : deux êtres issus d'un pays opposé à l'autre dans le contexte de la guerre, qui s'éprennent l'un de l'autre. Quel mal ont-ils fait ? Et pourquoi , la guerre terminée, appliquer de telles sanctions qui ne changent plus rien à l'affaire ? Si ce n'est infliger une humiliation gratuite.

      Supprimer
  2. Beaucoup furent obligées (question de vie ou de mort).
    D'autres n'avaient rien fait mais c'était l'époque des règlements de compte.
    Certaines dont c'était le métier (hé oui) ont permis bien souvent grâce aux confidences sur l'oreiller de récolter de précieux renseignement qui aidèrent la résistance (ce fut vite oublié à la libération)
    Puis il y avait parfois aussi l'amour qui s'en mêlait, que faire contre ça.
    Au milieu de ça il y eu peut-être quelques "vraies garces" mais je pense que celles-ci ont eu tout le loisir de fuir la France avant la débâcle et ont vécu une douce vie dans des pays ensoleillés.
    Celles qui ont subi cette humiliation, voire pire ont pour la plupart été victimes de vils règlement de compte comme après toutes les guerres.
    Ce ne sont jamais les vrais tyrans, ni les tireurs de cordes qui morflent mais les plus faibles.
    Vais-je aller plus loin en disant qu'il faut pour les enfants de ces femmes demander pardon au nom du peuple Français qui dans l'euphorie de la libération n'a pas toujours non plus été bien "net".
    Mais là c'est un autre sujet.
    Bravo Dzovinar d'avoir le courage de parler de sujets qui "dérangent". C'est très courageux de ta part.
    Je t'embrasse bien fort.
    Belle journée

    RépondreSupprimer
  3. Comme souvent, tu vas au fond des choses - et au-delà quand tu évoques les enfants de ces femmes (comment se sont-elles remises de telles humiliations ?). Merci encore de participer si fidèlement aux thèmes divers qu'aborde ce blog. Je t'embrasse et te souhaite un très beau week end (ça devrait être très ensoleillé dans nos parages et ailleurs !)

    RépondreSupprimer

Quelques lignes signalant votre passage me feront toujours plaisirs. Si vous n'avez pas de blog, vous pouvez néanmoins poster un commentaire en cliquant sur "Anonyme" et signer de votre nom ou un avatar. Amicalement,
Dzovinar