LA PAGE DE NIKOS LYGEROS


 UNE PERSONNALITE HORS DU COMMUN

- Présentation du Professeur LYGEROS -
(naissance le 30 avril 1968 à Volos - Grèce)

Professeur de Mathématiques, de Linguistique, d’Epistémologie et de Management Stratégique aux Universités d’Athènes, de Thrace et à l'Ecole Polytechnique de Xanthi, Professeur de Stratégie, Géostratégie et Topostratégie à l'Académie de Police, l'Ecole de Sécurité Nationale, l'Ecole de l'Armée de l'Air, l’Ecole de Défense Nationale, l’Ecole de Stratologie, Conseiller stratégique au Ministère de la Défense, Conseiller Scientifique au Ministère des Affaires Etrangères, Directeur de l’Institut Carathéodory, Expert Judiciaire près la Cour d'Appel de Lyon, Observateur international, Spécialiste d'Etudes Léonardiennes, Spécialiste de van Gogh, Ecrivain, Poète, Auteur dramatique, Metteur en scène, Peintre, Créateur de tests de Q.I.
Ecrivain prolifique, mathématicien émérite, peintre de génie, cet homme de tous les superlatifs semble capable de s'approprier les disciplines sur lesquelles il se penche au point d'atteindre un niveau d'excellence et une reconnaissance mondiale.  Avec un Q.I. de 189  à l'échelle de Stanford - Binet  il est l'une des 50 personnes les plus intelligentes dans le monde.


(Exposition)



(vidéo - Lumineuse et le Dragon)

( + Vidéo "Fusains humains")

(Poème)

(Poème)

(Poème)

(Poème)

(Poème)

(Poème)

(Poème)

(Poème)

(vidéo-Exposition)

(vidéo-Poèmes)

(vidéo-Poèmes)

(vidéo-Poèmes)

(vidéo)

(Poème)

(Poème)

(Poème)

(vidéo-Poèmes)

(Vidéo)

(Poèmes)


(Poème)

(Vidéo - poèmes)

(vidéo - poèmes)

(photos-poèmes)

(au Takadum-Thessalonique)

(Reportage)

(vidéo-Poèmes)

(Poèmes)

(Poèmes)

(Poèmes)

(Poèmes)


vous pouvez accéder directement au site
 de Nikos Lygeros ici :

http://www.lygeros.org/

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La logique juridique

N. LYGEROS

La logique juridique n'est pas l'histoire
mais l'outil nécessaire
pour lutter contre les agresseurs
des hommes et de celle-ci.
La loi est dure mais c'est la loi.
Et sur ce principe nous devons
protéger les innocents
incapables de se défendre
en plaçant entre eux et les bourreaux
le rempart de la justice
sinon nous risquons de participer
non pas à notre insu
au massacre des survivants.


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La cohérence historique

N. Lygeros

Nous ne pouvons accepter
ni la destruction des corps
ni celle des esprits
car il s'agit bien de cela
lorsque nous luttons tous
contre la négation
aussi ne nous fourvoyons pas
dans un prétendu faux débat,
la cohérence historique
ne peut se faire sans législation
car sans celle-ci nous laissons
libre champ aux bourreaux
pour effacer l'histoire. 
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Dans une immense bibliothèque
N. Lygeros
Traduit du Grec par A.-M. Bras
Dans une immense bibliothèque, le maître et sa disciple étudient des papyrus. Le maître lit en silence et sa disciple prend des notes.

- Maître ?
- Dis-moi, disciple...
- Ceci est le travail du silence ?
- C’est la lecture des morts.
- Et vous commencez toujours de cette façon ?
- Si tu ne lis pas les morts, tu ne peux pas écrire pour ceux qui ne sont pas nés.
- Cela je le comprends, Maître.
- Alors ?
- Alors nous, que sommes-nous ?
- Les ponts.
- Les ponts ?
- Les phares, si tu préfères.

La disciple fit une grimace caractéristique. Elle était maintenant à Alexandrie et connaissait exactement le symbolisme et l’essence du phare. Mais ce qui l’avait surprise était le mot « ponts ».

- Pourquoi des ponts ?
- Pour faire unir les berges.
- Quelles berges ?
- Le passé et l'avenir.
- Et le présent ?
- Il coule sous nos pieds.
- Et il ne nous touche pas.
- C'est cela l'idée.
- Donc, nous sommes nos livres.
- Je ne le dirais pas autrement.
- Mais vous, maître, vous n’êtes pas un livre.
- Certains doivent être des encyclopédies pour que vivent les livres.
- Et ceux qui brûlent les livres ?
- Ce sont nos ennemis.
- Les barbares.
- Ils commettent un crime contre l'humanité.
- Et ces papyrus, maître ?
- Ce sont les livres les plus anciens et il faut y faire attention comme à la prunelle de ses yeux.
- Vous avez raison, maître.
- Ici se trouve la source de notre civilisation.
- Avec vous je le ressens plus intensément.
- C’est ce qu’il faut.
- Et s’ils se perdent ?
- Il ne faut pas.
- Et si cela arrive ?
- Nous mourrons d'abord.
- Et puis ?
- Nous reviendrons pour continuer l'histoire.
- Maître, c’est pour cela que vous écrivez tant ?
- C’est pour cela que tu dois lire.
- Je lis, maître, je lis.
- Sinon, tu ne serais pas ma disciple.
- C'est vrai, et je ne le supporterais pas.
- Tu supportes, je le vois.
- Je fais ce que je peux.
- Ce n'est pas suffisant.
- Avec vous, je fais ce que je ne peux pas.
- C’est ce qu’il faut.
- Maître, m’expliquerez-vous ce texte que vous lisez ?
- Nous le faisons déjà.
- Mais vous ne m’avez pas dit un mot.
- Tout commence par le silence et surtout pour celui-ci.
- Mais pourquoi ?
- Ainsi se lit Archimède.

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Vingt-quatre pays déjà !

N. Lygeros

Vingt-quatre pays déjà 
ont reconnu l'Holodomor
comme un génocide
et toi tu te demandes
une fois encore maintenant
quelle position prendre
face à ce crime contre l'humanité
alors que les millions de victimes
crient sans cesse
leur silence depuis 1932
et restent auprès de nous
pour nous forcer à défendre
les droits des survivants
face à la barbarie stalinienne
car c'est notre rôle
en tant que Justes
et serviteurs de l'Humanité.


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La petite carte

N. Lygeros

Dans la classe, 
la petite arménienne n’était pas à sa place. 
Elle regardait 
non pas le maître qui parlait une autre langue 
mais une petite carte qui ressemblait 
à ce qu’elle n’avait jamais vu. 
Elle voulait demander au maître la signification 
non pas de la légende des ancêtres 
mais celle de la petite carte. 
Seulement la carte tomba du mur 
et atterrit sur l’estrade. 
Le maître continua la leçon. 
Il n’avait rien vu. 
Et il finit par la piétiner. 
Ce jour-là elle pleura pour la première fois 
pour ce papier que les gens brûlaient 
par plaisir. 


http://www.lygeros.org/articles?n=2557&l=fr


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Le grand pardon

N. Lygeros

On nous demande d’oublier. 
On nous demande de nous taire. 
On nous demande de ne pas condamner. 
On nous demande de donner le grand pardon. 
Seulement nous qui ne savons que donner, 
nous ne pouvons donner ce que nous n’avons pas, 
notre avenir ! 
Et comme nous ne savons pas demander, 
nous exigeons le droit d’exister pour nous souvenir 
et pour juger les bourreaux de l’histoire. 


http://www.lygeros.org/articles?n=2546&l=fr


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Mémorial Lyonnais dédié au génocide subi par les Arméniens

Du chaos génocidaire à la complexité architecturale

N. Lygeros

Nous nous efforçons parfois de comprendre la simplicité de certaines notions car elles bouleversent et ébranlent notre pensée. Parmi ces notions, nous trouvons le génocide. Perçu comme une entité abstraite, le génocide semble inconcevable. Le chaos qu’il provoque sur un peuple n’est pas modélisable aisément. C’est d’ailleurs une des difficultés de sa reconnaissance. Néanmoins, ce chaos génocidaire est malgré tout représentable. Seulement pour cela, il faut utiliser la complexité architecturale. Sans celle-ci le symbole reste symbolique et par conséquent obsolète. Une des représentations les plus élégantes de cette problématique, c’est le Mémorial Lyonnais pour le génocide des Arméniens. En effet ce mémorial, contrairement à d’autres, ne se contente pas d’exister, il s’impose par sa nécessité et celle-ci n’est accessible que par la simplicité de sa complexité. 

Au premier abord, les trente-six éléments qui constituent cet ensemble architectural, semblent identiques. Mais l’examen attentif de chacun d’entre eux permet d’effectuer le constat suivant : chaque élément a un rôle. Celui-ci n’est pas nécessairement intrinsèque même si cela est le cas pour certains d’entre eux puisqu’ils portent les stigmates des poèmes. Chaque feuille de pierre pointe tel un atlas minéral l’éclat de l’histoire. Les pierres suspendues sont en effet toutes différentes. Ainsi des éléments identiques en ductal portent des pierres uniques. Le futur supporte et soutient le passé. Quant au sens des éléments, il est à nouveau double. Aussi les éléments ont un rôle extrinsèque à leur nature. Leur disposition dans l’espace donne des informations sur le temps. Portée musicale abstraite, l’alignement des feuilles de pierre, joue la musique du silence sans nuire au passant. Filtre de l’indifférence, le Mémorial représente une transfiguration. En apparence aléatoire, il est absolument déterministe. Il engendre ainsi un chaos déterministe. L’assemblage de la simplicité engendre le complexe qui modélise le chaos. Le caractère incompréhensible du génocide devient compréhensible via la structure du Mémorial comme pour mieux mettre en évidence la portée de la phrase d’Albert Einstein à savoir : la chose la plus incompréhensible du monde, c’est que le monde soit compréhensible. 

La synthèse que représente le Mémorial au sens créatif du terme permet de créer un modèle abstrait du génocide. Le Mémorial fonctionne comme le négatif du génocide pour lutter contre sa négation. A travers cet isomorphisme formel établi par l’architecte, le Mémorial devient l’outil le plus puissant pour aller au delà de la reconnaissance, pour atteindre la pénalisation et poursuivre le processus de réparation. La complexité architecturale du Mémorial rend accessible le chaos génocidaire. Ainsi l’histoire du Mémorial commence à peine car sa mission n’est pas finie.


http://www.lygeros.org/articles?n=2542&l=fr


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Sur l’envergure du mémorial

N. Lygeros

Traduit du Grec par A.-M. Bras

Le Mémorial Lyonnais pour le génocide des Arméniens n’est pas seulement un symbole. Il ne recherche pas une symbolique spécifique. Car la pire des choses qui puisse arriver à un symbole, c’est de devenir symbolique. Le rôle du Mémorial n’est pas seulement commémoratif. Il ne s’agit pas uniquement d’un objet lié au souvenir. Il ne peut être que cela. Car le souvenir n’est associé qu’à ce qui est reconnu et incontestable. Le Mémorial a une dimension de revendication car la Turquie n’a pas encore reconnu son rôle dans le génocide. Le Mémorial n’est pas seulement beau. Sa présence est gênante. Son architecte a réussi la prouesse de l’intégrer parfaitement dans le patrimoine lyonnais. Aussi bien intégré dans son contexte, il en devient encore plus gênant par son envergure humaine. Car son universalité embrasse les droits de l’homme. Il est donc devenu le fer de lance d’une cause qui transcende l’arménité pour mettre en valeur l’humanité. Son existence à l’instar de celle d’un survivant du génocide dénonce le crime contre l’humanité. Si son architecture est restreinte à un podium d’une place aux côtés d’un clocher, il n’en est pas de même pour sa mission. Nous avons un bel exemple d’œuvre qui dépasse son concepteur, et de mission qui transcende l’œuvre. Si cette dernière existe cela provient du fait que la France a reconnu le génocide des Arméniens en 2001. Si cette œuvre n’a pas été détruite et saccagée par la barbarie turque, c’est en raison du processus de pénalisation qui se met en place. Le Mémorial est un indicateur pour les droits de l’homme. Son état architectural montre celui de l’état français. Si nous fléchissons face aux menaces alors le Mémorial sera détérioré comme il l’a été au moment de nos faiblesses. Du point de vue esthétique, le Mémorial est l’analogue du portrait de Dorian Gray, la célèbre œuvre d’Oscar Wilde. Sa beauté sera défigurée et ce d’autant plus, que notre lâcheté envers la barbarie sera grande. L’architecte du Mémorial nous a offert ce tableau dépourvu de symbolique interne afin de nous permettre de mieux représenter la nôtre. Si le Mémorial est beau c’est parce que la France a reconnu le génocide des Arméniens. Si nous voulons que le Mémorial ne soit pas saccagé, nous savons ce que nous avons à faire. Le Mémorial fonctionne donc comme un témoin du passé mais aussi comme un gardien de l’avenir. Si sa présence gêne c’est parce que son existence revendique. Il ne se contente pas d’être, il devient. L’architecte du Mémorial n’a pas offert une œuvre statique. Le Mémorial a une dynamique à l’instar d’une partition de musique qui n’attend que d’être jouée. Seulement le Mémorial n’attend pas, il joue déjà son rôle et celui-ci est universel car il est le silence des langues, de toutes les langues.


http://www.lygeros.org/articles?n=2531&l=fr


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L’apport suisse dans la cause arménienne par Nikos Lygeros

Dans le monde francophone, nous nous concentrons bien souvent sur le cas de la France. Même si cela est naturel, ce n’est pas forcément opportun pour l’ensemble des situations. En ce qui concerne la cause arménienne, la loi de 2001 sur la reconnaissance du génocide des Arméniens et la problématique de la pénalisation de la négation du génocide, donne l’impression que tout se passe en France. Or la cause arménienne – même dans l’espace francophone – ne dépend pas exclusivement du positionnement de la France sur la scène internationale. Nous pensons qu’il serait plus judicieux de construire l’ensemble de notre stratégie sur des bases solides qui ont prouvé leur efficacité dans le temps. Ainsi le rôle de la Suisse constitue un paradigme. Ce petit pays est un défenseur des droits de l’homme redoutable. Bien souvent nous ne mentionnons que la neutralité suisse avec une certaine condescendance, sans réaliser que cette neutralité n’a de sens qu’avec un positionnement fort. La Suisse est exemplaire à plusieurs niveaux et pas seulement symbolique comme la garde suisse du pape. L’impact de la Croix-Rouge dans le monde n’a nul besoin d’être démontré. Quant à l’armée suisse et sa capacité de dissuasion, ce sont des données militaires certifiées. Aussi il ne faut pas être surpris par le fait que la Suisse ait déjà voté la reconnaissance du génocide des Arméniens ainsi que la pénalisation du négationnisme. Nous devons nous rendre compte que la Suisse se trouve dans ce domaine au delà de l’horizon français. Par conséquent elle peut servir d’exemple dans la réalisation du concept. Car le processus de réparation n’a pas un but qui se réduit à la reconnaissance symbolique d’un génocide. Le processus de réparation correspond à un ensemble de mesures à prendre qui ne sont pas forcément suffisantes pour les victimes du génocide mais qui sont certainement nécessaires pour les survivants du génocide. Aussi pour prendre de revers les négationnistes qui sont particulièrement virulents en France, nous ne devons pas nous contenter d’un combat dans cet espace. Sinon nous risquons de tomber dans une problématique communautaire. Par contre personne ne peut accuser les Suisses d’être des Arméniens. Aussi il est préférable de mettre en avant l’apport suisse pour donner un cadre de négociation cohérent et efficace. Le positionnement suisse n’a rien d’extrême. Il se base exclusivement sur les notions des droits de l’homme. Sa dureté ne provient que la nécessité de condamner les bourreaux et de neutraliser ceux qui seraient tentés de commettre la même chose de manière indirecte en soutenant un génocide de la mémoire. L’apport suisse est essentiel car il permet de rendre nos arguments incontestables. Sans tomber dans les pièges des stratagèmes développés par les lobbies turcs, nous pouvons mettre en exergue la situation suisse et contrer les attaques fallacieuses de leur propagande. L’exemple suisse permet aussi de convaincre les indifférents à la cause arménienne. Dans leur ensemble, ces derniers pensent que nos revendications sont exagérées. Tandis que la connaissance des données suisses dans le domaine, leur permet de réaliser d’eux-mêmes que nos revendications ne sont que des réalisations des droits de l’homme. En recadrant le centre de notre combat sur l’exemple suisse, il est possible de lui donner une assise non seulement plus neutre mais surtout plus convaincante pour des personnes qui ne connaissent que de loin la problématique du génocide des Arméniens. Cela leur permettra de prendre conscience du caractère universel de la cause arménienne en tant que lutte contre un crime contre l’humanité.

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L’art de la culpabilisation

N. Lygeros

Nous étions à moitié nus dans la prison.
Mais cela ne suffisait pas à nous avilir.
Alors nos bourreaux utilisèrent la pomme de terre.
Ils nous affamaient durant des jours
et soudain ils apportaient une pomme de terre.
Une seule pour vingt personnes affamées.
Alors nous nous jetions les uns sur les autres
pour tenter d’en manger un morceau.
Mais bien souvent c’était un lambeau
qui pendait à nos lèvres.
Le supplice dura des semaines.
A la fin nous nous sentions tous coupables.
Nos bourreaux avaient réussi leur pari.
Nous ne nous sentions plus des victimes,
nous n’étions plus que des bourreaux nous aussi.
Il nous fallut des années pour transcender
cette culpabilisation artificielle
et condamner les bourreaux,
les véritables.

http://www.lygeros.org/articles?n=2607&l=fr

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Les corps labourés

N. Lygeros

La terre avait donné son dernier souffle. 
Dans l’immensité des étendues régnait le néant. 
Le soc n’avait plus rien à labourer. 
Ainsi vint le tour des hommes 
ou plutôt de leur âme 
car la famine les avait déshumanisés. 
La mort labourait leurs corps 
et semait la panique. 
Plus rien ne pouvait lui résister. 
La terre des hommes devint le souvenir des champs.


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L’éclat noir de l’arménité

N. Lygeros

L’obsidienne n’était pas seulement noire comme l’histoire. 
Elle était aussi tranchante que le crime. 
Seulement c’était sa diaphanéité et sa pureté 
qui emportaient mon regard dans le tréfonds de sa passion. 
L’éclat noir de l’arménité 
celui qui avait marqué les dragons 
s’enfonçait peu à peu dans la mémoire 
pour ne pas oublier l’essentiel. 
Paradoxe minéral, 
mémoire oubliée, 
lutte inégale 
et grandeur humaine. 
Telle était la leçon de la pierre d’antan.


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De la reconnaissance à l’arménité
N. Lygeros

La reconnaissance n’est pas une fin en soi. D’une part, elle appartient au processus de réparation et d’autre part, elle constitue seulement un élément de la notion d’arménité. Tandis que cette dernière représente l’essence même du peuple arménien. Aussi la reconnaissance doit être incorporée dans un ensemble d’actions convergentes pour parvenir à l’essentiel de la cause. Ces actions existent aussi bien dans l’état d’Arménie que dans la diaspora. Cependant elles ne sont gère mises en évidence de peur d’être comparées à la reconnaissance elle-même. Cette attitude loin de mettre en avant la reconnaissance, contribue en réalité à rendre l’ensemble du processus inefficace. 

La multitude des actions à mettre en place est très grande. Car il ne faut pas effectuer des hiérarchies de valeur. Selon le public un moyen peut être plus ou moins efficace par rapport à un autre. Nous pensons qu’il faut avoir une vision arménienne de l’ensemble et tenter d’établir des critères de convergences. Chacun contribue à sa manière au-delà des clivages. Les traductions systématiques de documents d’archive, les études sur les cartes, l’apprentissage de la langue, l’édition de livres, de revues et même de bandes dessinées contribuent à faire connaître l’arménité et via celle-ci l’existence du problème génocidaire. La réalisation d’un film produit certes un très fort impact général mais elle n’affecte que très peu le travail de fond. Ce dernier n’est possible et n’est véritablement efficace contre l’appareil de propagande turc que s’il est mené de manière intensive. Il en est de même pour la réalisation d’un mémorial qui ne doit pas être seulement considéré comme l’aboutissement d’un travail, mais comme le point de départ et le fer de lance d’actions à mener autour de sa présence. De la même manière, nous devons mener des actions qui visent à faire découvrir l’Arménie et par ce mot nous n’entendons pas seulement l’état d’Arménie mais surtout les territoires occupés et les territoires libérés. Car ce sont ces derniers qui ont besoin de revoir des Arméniens. Quant aux Arméniens c’est aussi par ce biais qu’ils découvriront l’importance de leur rôle à jouer dans la cause. Parfois c’est en apercevant les vestiges d’une église ou l’isolement d’un pont de pierre que nous saisissons la nécessité de protéger un patrimoine culturel. 

Grâce à l’expérience de nos interventions dans les territoires occupés de Chypre nous savions l’impact produit sur nos réfugiés lorsqu’ils découvrent un cimetière saccagé, une maison en ruine, une église détruite, une école close. Dans ces instants leur courage redouble et ils prennent conscience de la nécessité de lutter. Seulement il faut ensuite se donner les moyens, exploiter des cartes d’état major, connaître le cadastre pour étudier et faire des recours à la Cour Européenne des Droits de l’Homme pour exercer des pressions sur l’UNESCO, l’ONU mais surtout contre les forces d’occupation turques. Un travail analogue doit être effectué dans le cadre de la reconnaissance de l’arménité. Car cette dernière ne dépend pas seulement du passé mais aussi du futur. Il est donc nécessaire d’impliquer les jeunes arméniens dans cette reconnaissance.


http://www.lygeros.org/articles?n=2643&l=fr

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Les jeux interdits de l’enfance
N. Lygeros

Les enfants n’étaient pas tous morts. 
Ils jouaient encore avec les osselets 
de leurs petits camarades de classe. 
Sans comprendre les règles sociales, 
sans saisir les ravages de la politique, 
les enfants s’amusaient avec les autres 
afin de ne pas les oublier malgré leurs morts.

http://www.lygeros.org/articles?n=2648&l=fr

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De l’absence de combat au combat de la perte
N. Lygeros

Cela est surprenant mais parfois l’absence de combat est pire qu’une perte. L’absence de conflit ne permet ni de gagner ni de perdre le conflit mais peut conduire à la perte d’identité. Ainsi les premières révolutions, celles qui sont vouées à l’échec, malgré la perte qu’elles représentent préparent le terrain des suivantes qui seront victorieuses. Il est certes nécessaire d’avoir des hommes prêts à se sacrifier mais si c’est le cas l’objectif de la préparation peut être mené à bien malgré la puissance de l’adversaire. Pour comprendre ce phénomène il est nécessaire de mettre l’accent sur le fait que le combat même s’il mène à la perte est une remise en cause de la suprématie. C’est pour cette raison que celui qui domine, s’il n’a pas de stratégie gagnante doit d’autant plus vaincre qu’il a plus à perdre. L’absence de conflit conduit presque inéluctablement à l’occupation d’un état de fait qui est bien pire que celui d’une perte. L’absence de conflit stabilise les positions du dominant et le dominé pense que la situation ne peut changer. Le problème c’est que la conséquence de cette absence n’engendre pas seulement un dogme stratégique dominant mais aussi un traumatisme psychologique. La crainte de l’échec conduit des individus à considérer que la position de dominé est une situation normale. Et cette normalité conduit à considérer sa propre personne comme le résultat de cet état de fait. Tandis que si nous nous souvenons de la pensée stoïcienne et en particulier de la célèbre phrase d’Epictète à savoir : « Considère-toi comme un homme libre ou comme un esclave cela ne dépend que de toi », alors nous comprenons qu’il existe un schéma mental qui remet en cause le système du dominant. Le problème intrinsèque à cette situation, c’est que la position de l’esclave est malgré les apparences, bien plus confortable à tenir. En effet aucune initiative n’est nécessaire. Tout est laissé au dominant. Tandis que la position de l’homme libre représente un coût puisqu’il doit choisir son destin et que chaque choix est une forme de privation. De manière plus générale, nous devons être conscients qu’une terre n’est perdue face à un envahisseur que si nous décidons nous-mêmes qu’elle est perdue. Cette perte ne dépend elle aussi que de nous. Ainsi nous avons le devoir de décider qu’une terre considérée comme perdue par certains n’est en réalité qu’une terre occupée. Nous pouvons trouver des exemples de ce type en Grèce mais aussi à Chypre. Cependant le plus bel exemple se trouve en Arménie. Et ce mot suffit à lui-même. Nous ne parlons ni d’Arménie occidentale, ni d’Arménie orientale pas plus que d’Arménie historique. La réalité mentale de l’Arménie est une et indivisible. Elle est reliée au génocide mais pas seulement. Certes le génocide permet de définir par l’absence et par le lieu du décès des victimes ainsi que des déplacements, la réalité effective de l’Arménie. Seulement cette réalité est gênante car elle conteste le dogme stratégique turc. Aussi certains préfèrent mener le combat de la perte et considère qu’il n’est pas nécessaire de revendiquer ce qu’ils considèrent comme impossible à obtenir. Néanmoins les revendications se feront, les recours entreront dans l’histoire car sans cela la notion d’arménité n’aurait pas de sens.

http://www.lygeros.org/articles?n=2655&l=fr


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N. Lygeros: Sur un conte arménien

À première lecture, les contes arméniens sont toujours surprenants. Ce n’est pas tellement la chute elle-même qui provoque cette surprise mais plutôt l’approche du récit. Les contes arméniens sont empreints d’une gravité qui les rend très humains. Il est difficile de penser qu’ils sont conçus pour des enfants. Il est plus vraisemblable que leur auditoire soit en réalité tout le peuple arménien. C’est pour cette raison que nous sommes si sensibles à l’anthologie de notre amie Louise Kiffer qui s’y connaît si bien en fleurs sauvages. Et sans doute l’un est-il lié à l’autre. Car les contes arméniens sont comme les fleurs sauvages. Nous ne les trouvons pas dans un jardin à la française ou à l’anglaise. Ils sont libres et appartiennent à la nature arménienne. Il faut donc aller les chercher sur place, sans avoir la possibilité de les trouver dans un lieu connu. Les contes arméniens sont aussi une forme de diaspora dans la narration arménienne. Chaque auteur a voulu enrichir le patrimoine arménien sans attendre de récompense en retour. Le sourire, la joie et la surprise des enfants suffisent à sa peine. Le reste est superflu. Car le conte est avant tout un don, un don anonyme. Voilà l’un de ses paradoxes les plus profonds. Il est créé dans un cadre social mais transcende sa condition pour s’adresser à la graine de l’humanité, les enfants. Après tout, Jacques Brel, l’a bien chanté même s’il a fallu entendre Charles Aznavour pour le comprendre. Les enfants sont tous les mêmes, ce n’est qu’après, longtemps après… Voilà pourquoi il est difficile de comprendre pourquoi les contes arméniens nous touchent autant. Car quelques détails suffisent à nous émouvoir. Comme si nous étions devant les broderies d’un costume traditionnel. Est-ce notre manière à nous de découvrir l’oubli d’une réalité, est-ce notre façon de rechercher cette réalité passée ou est-ce notre conscience de l’arménité ? Dans tous les cas, nous ne pouvons rester indifférents au récit, comme s’il puisait dans nos entrailles pour révéler les trésors de la terre des pierres. Comme si le narrateur sculptait dans notre nature humaine pour découvrir la croix nouée cachée en nous. Dans les contes arméniens, il faut avoir de grands yeux noirs pour être capable de pleurer devant l’émotion des enfants. Ainsi nous retrouvons en nous l’âme de Papik, et Tatik au moment où ils racontaient des histoires aux petits que nous étions dans le temps. Car c’est justement cet ancrage dans le temps qui nous caractérise. Innocents ou justes, survivants de la diaspora, nous sommes tous conscients que, malgré la volonté de la sublime horreur, nous sommes toujours là, à œuvrer pour l’humanité d’un peuple mais aussi pour le peuple de l’humanité. C’est l’ensemble de cela que nous retrouvons dans l’âme du conte arménien et c’est à cette âme que nous avons voulu rendre hommage avec le conte La Lumineuse et le dragon.


http://www.lygeros.org/articles?n=4257&l=fr

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 Sur les fleurs coupées d'Arménie
Nikos Lygeros

Lorsque les femmes reçoivent des fleurs, combien d'entre elles sont conscientes de la différence entre celles qui sont coupées et celles qui sont en pot? En effet, dans la société de l'oubli et de l'indifférence, cela n'a aucune importance. Et pourtant sur le plan humain, la différence est fondamentale car elle se situe au niveau des racines. Sans celles-ci, les fleurs sont condamnées à mourir. Ainsi l'offre est celle de la mort. De 1894 à 1923 les arméniennes n'étaient que des fleurs coupées par la barbarie des régimes autoritaires d'Anatolie? Etait-ce l'unique bonté de la barbarie ? Chaque génocideur offrait à sa société barbare un bouquet d'arméniennes. N'étaient-elles donc que cela? Certainement pas! Certains d'entre eux ne voyaient en elles que des mauvaises herbes qu'il fallait déraciner pour qu'elles n'envahissent pas la pureté ottomane. Voilà pourquoi les fleurs sauvages d'Arménie si chères à notre infatigable Louise, représentent des points de résistance de l'arménité face au néant de la civilisation. Les fleurs coupées arméniennes sont les victimes du génocide que nous tentons encore de nos jours de faire reconnaître par la communauté internationale face au mépris du régime turc. Sans doute de les couper ne lui suffisait pas. Il voulait en faire uniquement de l'engrais, du fumier végétal. Seulement ces fleurs coupées, contre toute attente n'ont pas pourri avec le temps, car le temps est avec nous, aussi impensable que cela puisse paraître. Car le crime contre l'humanité est imprescriptible non seulement pour l'humanité dont la barbarie se moque mais aussi pour le droit international. Il semble donc que ces fleurs coupées à qui la barbarie a tranché la vie ont décidé de ne pas mourir dans notre mémoire afin de nous obliger à condamner les bourreaux. Elles appartiennent à notre conscience collective malgré la volonté de la barbarie de l'oubli. Comme des fleurs séchées, elles sont inséparables de notre décor. Elles hantent nos maisons, comme les Khatchkars nos plaines. Elles nous protègent de nous-mêmes et de la facilité que nous avons à oublier la mort afin de vivre, sans réaliser que cela est tout simplement impossible pour des êtres humains. Car c'est cela que nous sommes avant tout. Nous ne pouvons nous contenter d'être des êtres sociaux ou politiques. L'humanité est bien au-delà de ces détails de circonstances qui n'ont qu'un sens éphémère. Les fleurs coupées arméniennes ne cessent de rappeler à notre mémoire qu'autrefois elles poussaient sur nos terres. Aussi leur existence même à des milliers de lieues de leur origine ne nous montre pas l'oubli ou la décadence d'un peuple sans mémoire, mais l'existence d'une terre sacrée de nos ancêtres qui ne peut oublier l'essence des fleurs arméniennes. Car elle embaume encore le parfum de l'arménité malgré la puanteur de la barbarie de l'oubli.

http://www.lygeros.org/articles?n=4428&l=fr


Sur les fleurs coupées dArménie-Περί κομμένων λουλουδιών της Αρμενίας.

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Intelligence et Innovation
N. Lygeros
Traduit du Grec par A.-M. Bras

Beaucoup confondent impudemment la notion d'intelligence avec celle d’intuition. Et, bien sûr, ce sont ceux-là même qui identifient brevet avec innovation. De plus, à un niveau plus technique, il y a aussi un melange entre la découverte et une simple publication. Avec ce nivellement des concepts nous aboutissons soit à l'excès soit au dédain. Car tous ont l'impression de faire la même chose alors qu’ils effleurent seulement une de ces notions. Sur le plan scientifique, nous sommes toujours obligés de justifier la différence pour que devienne compréhensible la réalisation. Car une innovation comme celle de Tesla n’est pas juste un brevet. Car une intelligence comme celle d'Einstein n'est pas seulement de l'intuition. Et une découverte comme celle de Galois n’est pas seulement une publication. De même dans ce cadre se pose aussi la question de l'inventivité qui n'est pas de la simple créativité. C’est pour cette raison que nous examinons spécifiquement la combinaison de l'intelligence avec l'innovation. Dans ce contexte, il est important, méthodologiquement, d’identifier la valeur de l’abduction par rapport à l'induction et la déduction. La branche innovante de l'abduction qui lui donne aussi son caractère radical, est le risque de conclusion inévitable puisqu’elle est basée sur beaucoup moins de données . Par conséquent on a besoin d'une gestion de crise avec une notion positive et efficace. Pour cette raison l’intelligence est indispensable pour la solution mais aussi l’approche. Cela ne signifie pas qu'elles sont nécessairement du même type comme le montre l'exemple de Hardy et Ramanujan. Mais il faut des connaissances pour passer le stade de l'innovation, laquelle aura des applications. Car elles aussi sont importantes car sinon le procédé peut dégénérer et n’aboutir qu’à un brevet. Ceux qui croient que ce critère n'est pas nécessaire, peuvent examiner l'histoire et l’inventaire de ces idées qui ont changé la vision du monde. Donc l'intelligence et l'innovation peuvent être présentées comme une combinaison qui produit une oeuvre et pas seulement une pensée. Ce n'est pas une philosophie mais un acte.

http://www.lygeros.org/articles?n=14241&l=fr

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Le serment des hommes
N. Lygeros

Sur le sommet des montagnes 
et sur le toit des églises 
nous ne contemplons pas notre passé, 
nous préparons l’avenir d’un peuple 
qui ne veut plus s’agenouiller 
devant l’insupportable barbarie 
et qui ne veut se baisser 
que pour baiser à nouveau sa terre. 


http://www.lygeros.org/articles?n=2656&l=fr

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 Sur l'indigo d'Arménie
Quel sens donner à l’indigo d’Arménie ? Doit-on y trouver un symbole national ? Une énigme littéraire ? À moins que l’objectif ne soit plus profond encore. Il faut donc chercher ailleurs que dans le drapeau historique, remonter à une période plus ancienne et aller plus loin dans l’avenir comme si le génocide était un signe sans être un stigmate. Il faut donc aller au delà malgré la barbarie de l’oubli. Car nous sommes toujours là malgré la mort de l’horreur. Dans l’étrangeté de cette couleur nous ne recherchons pas la solitude mais la rareté. Il ne nous suffit pas de quelques tubes de peinture, malgré la présence du violet de cobalt, pour créer l’indigo d’Arménie. Ni le bleu de Prusse, ni le jaune de Naples ne pourraient nous contenter dans cette quête à laquelle un homme comme Jacques Brel serait si sensible après son interprétation du Don Quichotte de Miguel de Cervantès. Car les villes s’éclabousseraient de bleu dans l’ocre de la terre et le rouge du tuf. Alors pourquoi ne pas retourner à Berzor dans l’Artsakh pour retrouver ces couleurs dans l’ancien musée où s’entassaient avec amour les vestiges antiques, les broderies traditionnelles et les tableaux de peinture. Sans chercher à s’appesantir sur un point particulier, n’est-il pas essentiel de perdre son temps dans la contemplation d’un silence qui a désormais un sens ? C’est uniquement de cette manière qu’il est possible de se souvenir de ce jeune garçon que nous avons rencontré. C’était le petit-fils de la directrice du musée. Il voulait savoir sans oser demander, quel était le sens de cette dédicace poétique. Il aimait être près de nous comme si notre présence suffisait à le réjouir. Nous étions une nouvelle antiquité pour lui. Seulement nous étions mobiles et il préférait l’immobilité. Cela convenait mieux au musée mais aussi à la bibliothèque du bureau de sa grand-mère. Il ne s’inquiétait que de notre départ et non de la pauvreté de notre scène. C’est dans cette double observation que nous avons vu l’indigo d’Arménie, comme un signe de reconnaissance. Était-ce la couleur de la rencontre d’un caméléon avec un hippocampe, rien n’est moins improbable. En tout cas, la reconnaissance était certaine malgré la différence de connaissance. Était-ce semblable à la rencontre d’un mort avec un non encore né, ce n’est impossible que pour la société. Alors l’humanité décide de se souvenir pour ne pas perdre le tableau de la sérénité d’un silence oublié dans la lecture d’un parchemin non encore devenu palimpseste. Ce n’était donc plus un secret, les hommes avaient survécu et étaient capables d’envisager à nouveau l’avenir sans se contenter de vivre dans la vente d’un présent toujours absent dans l’essentiel. Oui, c’était cela le sens de l’indigo d’Arménie : un zeste de blues dans un doudouk de combat, une mémoire dans un chant patriotique et enfin un enfant trouvé dans un musée perdu dans l’oubli des négociations de l’absurde.


http://lygeros.org/articles?n=4541&l=fr

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Sur l'Arménien sans Arménie

Comment imaginer un homme malheureux sans le voir ! En pensant à lui.

Comment imaginer une feuille sans arbre ? En regardant un papier d’Arménie.

Alors pourquoi ne pas penser à lui, pourquoi le brûler ?

Est-ce la fatalité ? Certes non.

Est-ce la nécessité ? Encore moins.

C’est seulement le misérabilisme de la société.

Dans sa recherche désespérée du bonheur, tout obstacle lui est insupportable. Certains arbres perdent leurs feuilles. Cela est dans la nature des choses. Mais que dire des feuilles qui perdent leur arbre ?

Avec le génocide, l’Arménie a perdu beaucoup d’Arméniens et cette perte est encore présente dans notre mémoire même si elle a les stigmates de l’absence. Seulement avec le génocide de la mémoire, ce sont cette fois, les Arméniens qui perdent l’Arménie. Seulement comment le réaliser si le concept d’Arménien sans Arménie est incompréhensible ? Comment résister sans avoir conscience de l’action ? Or cette action est subversive. Elle ne se contente pas de brûler la feuille, elle cherche à démontrer l’inexistence de l’arbre et pour y parvenir, elle coupe toutes les racines. Cependant il ne s’agit pas d’un arbre qui cache la forêt, mais de feuilles qui cachent l’arbre.

Nous regardons l’Arménien sans voir l’Arménie. Nous nous habituons à voir en lui un habitué de la diaspora. Comme s’il était arrivé de nulle part. Or cela est impossible car l’arménité existe. Mais cela ne garantit pas qu’elle ne se meure pas.

L’important c’est la compréhension du temps. Le crime contre l’humanité est certainement imprescriptible, mais qu’en est-il de la durée de vie des victimes ? Car une feuille tombée de l’arbre est sans aucun doute une feuille mais une feuille morte. Et comment des feuilles mortes pourraient-elles parler d’un arbre vivant ? Tel est le paradoxe de l’arménité. Tel est l’essence du papier d’Arménie. Les feuilles mortes ne parlent aux vivants qu’à travers le livre. Tel est le secret de l’arménité. Il est partagé par toutes les civilisations qui ont traversé le temps malgré les tourmentes de l’espace.

Le problème actuel, si nous pouvons réellement parler d’actualité, c’est l’omniprésence et la suprématie du présent. Toutes les sociétés du présent tentent de briser les liens du temps afin de reproduire le présent dans l’avenir. L’Arménien sans Arménie n’est pas une utopie ou une abstraction formelle, mais un but stratégique de la part de l’appareil de propagande turque. C’est un potentiel capable de réaliser. C’est le devenir d’une autre réalité.

Aussi lorsque nous examinons une feuille sans arbre, prenons le temps de lui redonner son sens pour découvrir son essence avant qu’elle n’ait plus d’existence. Attardons-nous de plus auprès des hommes qui assemblent ces feuilles afin de les tacher avec de l’encre indélébile et en faire des livres d’histoire. Car c’est à travers ce geste que nous établissons les bases d’une résistance de la nécessité, d’une mémoire du devoir et du sacrifice de l’homme face à la barbarie de l’oubli.


http://www.lygeros.org/articles?n=4307&l=fr

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Les larmes du silence
N. Lygeros
Traduit du grec par A.-M. Bras

Jadis, la vague d’un peuple
se brisa sur l’invisible vert d’une ligne
et se perdit dans le regard 
de quelques mères.

Depuis, leurs larmes 
ont le goût du large 
et cachent la blessure du crépuscule.

Toute la souffrance d’un peuple 
dans une seule larme. 

Tous les mots dans un silence

http://www.lygeros.org/articles?n=253&l=fr

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Artsakh, mon amour

Si tu n'y as pas vécu,
si tu n'y es pas allé trois fois,
tu ne peux comprendre
l'Artsakh, mon amour
et tu ne peux voir
la résistance des montagnes
ni celle des hommes.
Aussi tu ne peux saisir
notre douleur arménienne
lorsque nous retrouvons
nos églises, nos monastères
criblés de balles ennemies
dans leur tentative
d'effacer toute trace.

N. Lygeros

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L'innovation du Greco
N. Lygeros
Traduit du Grec par A.-M. Bras

L'innovation du Greco est si importante qu’elle constitue un exemple de reconnaissance sur le plan mondial. Dans le domaine de la peinture la Hollande a l'analogue avec van Gogh et Rembrandt. Et pour les deux, il existe des couleurs de peintures à leurs noms. Les deux sociétés bien entendu sont hollandaises. Que voulons-nous montrer avec cet exemple ? Les Hollandais connaissent l’innovation des deux peintres et l’exploitent de façon rationnelle et stratégique, même sur le plan pratique. La question est pourquoi il n’y a pas quelque chose de semblable chez nous. Existe-t-il, en effet, un des nôtres pour croire que Domenikos Théotokopoulos n'est pas assez digne d’être exploité de cette manière? Nous parlons beaucoup des gens qui peignent, car c’est un sujet à la mode, tandis que les peintres sont rares, en particulier sur le plan de la reconnaissance mondiale. Et nous qui avons le Greco, nous ne connaissons même pas très bien son oeuvre. Alors pourquoi ne pas avoir un musée consacré exclusivement à lui ? En Hollande, nous avons vu pratiquement et in vivo une exposition montrant tout le travail figuratif de Rembrandt. Alors qu'il y a un musée Rembrandt à Amsterdam. La différence entre cette exposition et toutes les autres est simple. Bien que les pièces ne soient que des copies, là c’était toute l’oeuvre du peintre. Et la question est pourquoi il n'y a pas l’analogue dans notre pays pour le Greco. Une fois que la technologie est là, il en va de même pour le savoir-faire. C’est ce que nous voulons montrer avec ces exemples sont très simples et instructifs. Au contraire, nous en faisons une montagne, n’agissons pas et pleurons sur notre destin, rendons-nous compte que la seule chose de rare c’est de posséder un Greco et non de trouver des idées pour exploiter sa réputation et sa renommée. Dans notre pays, nous avons une matière première incomparable et des personnes hautement qualifiées, alors réunissons-les.


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L'esprit d'innovation
N. Lygeros
A.-M. Bras


L'esprit d'innovation n'est pas simplement un état d'esprit individuel. L'innovation est toujours examinée dans un cadre collectif, car elle est toujours relative aux données déjà existantes. Bien sûr, cela ne la limite pas et elle peut être radicalement différente des connaissances de l’époque. Elle peut également être une manière différente de regarder les faits connus. Il existe aussi un autre facteur nommé Serendipity qui représente la capacité à trouver quelque chose que l’on ne cherche pas. Dans ce champ d’action il est bien sûr difficile de construire une stratégie spécifique, bien qu’au niveau de la recherche nous utilisions des techniques type Brainstorming et Pensée Latérale. Mais la résolution d'un problème reste tributaire de la théorie de la décision. Ainsi, nous voyons qu'il y a une différence qui fait la différence, même sur le plan mental. Pour cette raison, lorsque nous avons créé notre premier groupe spécial en 1999, nous n’avons pas choisi de personnes précises, mais nous avons accepté ceux qui voulaient faire cette expérience novatrice sur la pensée. Ainsi sont apparues les notions de travail d'équipe et de complémentarité. Et depuis le début les problèmes pour le développement de notre pensée se sont transformés en conjectures. Donc, au fil du temps, nous avons battu un record du monde en théorie des nombres avec les nombres premiers, en théorie des graphes avec les ensembles muni d'un ordre partiel, en combinatoire et en théorie des superstructures. A la suite de cette innovation qui a permis de donner un cours à des étudiants de diverses disciplines et différents âges, nous sommes passés au stade de la collaboration avec des disciples capables de faire ce qu'ils ne peuvent pas car ils ont compris notre conception.

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L'innovation du passé
N. Lygeros
Traduit du Grec par A.-M. Bras






Il se peut que l'expression " 
L'innovation du
 passé " semble absurde à première vue, mais si nous l’associons à la machine volante de Leonardo da Vinci nous pouvons prendre conscience que non seulement elle a un sens mais révèle même un schéma mental concret et c'est celui d’une invention oubliée. En d'autres termes, l'innovation peut exister, mais n’être pas comprise des gens qui n'ont pas l'intelligence de son créateur. Le problème de cette innovation précise est qu’à l’époque ils trouvaient qu’elle se trouvait au niveau de l'inconcevable. Lorsque le chercheur se trouve dans une hiérarchie excessive, il existe toujours le risque de ne pas comprendre son invention. Pour cette raison, Leonardo da Vinci a écrit que le plus difficile pour un génie n'est pas de résoudre un problème, mais de convaincre les autres qu’il l’a résolu. Dans ce contexte, il nous faut prendre conscience du fait d’une information indispensable à passer pour accepter une nouveauté. Pour la machine volante Leonardo da Vinci avait pris des notes qui constituent un livre entier. Mais pendant des siècles cette précieuse idée avait été oubliée, car il n'existait personne qui pouvait la suivre, même son disciple lui-même. Ainsi, à cette époque on a raillé le Maître de la Renaissance parce que la société connaissait peu de choses sur l’envergure radicale de son oeuvre et de son érudition. Il est donc important que nous gardions à l'esprit lors de l'examen d'un brevet et de son évaluation de connaître ses propres projets, mais aussi leurs limites. Parce qu’on pourrait à l'avenir être responsable d'une innovation du passé qui n'a pas été reconnue. Car on a besoin d’une grande intelligence pour reconnaître un génie, puisque notre jugement ne dépend pas uniquement de son existence.

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Le syndrome du survivant
N. Lygeros

Avant de caractériser les peuples qui ont subi un génocide, il serait bon d’analyser le syndrome du survivant. Cela permettrait de comprendre le suicide de Primo Levi, le désespoir et le problème de la solidarité. L’impact produit par un génocide sur un peuple est difficilement mesurable. Il influence toute sa mémoire collective mais aussi sa psychologie. Car face à ces conditions extrêmes et inhumaines, l’individu en est bien souvent réduit à une survie biologique. Son mental est affecté car tout est remis en cause. Après le génocide, il n’existe qu’une certitude, la puissance de la faucheuse. Car c’est bien elle qui produit le résultat final et non la barbarie. Après cette épreuve, le survivant conçoit son existence comme une culpabilité. Il est coupable de ne pas être mort. Cette culpabilisation explique aussi bien le comportement des Juifs par rapport aux chambres à gaz, celui des Arméniens par rapport à la résistance, celui des Ukrainiens par rapport à l’anthropophagie. L’art du bourreau est avant tout celui de rendre la victime coupable. Son existence n’est pas une remise de peine. C’est bien souvent une nouvelle peine que la victime doit affronter seule et surtout mentalement isolée. Très peu d’hommes sont capables de faire survivre leur humanité après un génocide car l’acte de barbarie remet en cause leur foi en l’homme. Aussi il est trop facile de critiquer la solidarité d’un peuple dans ces conditions. Pour se reprendre il faut du temps car la prise de conscience est difficile. Tandis que le bourreau continue la huitième phase du processus génocidaire, avec le génocide de la mémoire. La victime ne s’est pas encore remise debout et le bourreau lui efface déjà son nom. Cependant la souffrance demeure même si elle ne s’exprime pas ouvertement. Le pire c’est que le bourreau connaît les sentiments de la culpabilité et d’infériorité, aussi il en profite pour asseoir son dogme stratégique. Mais le pire n’est pas le comportement du bourreau car même s’il est absurde du point de vue humain, il n’en demeure pas moins prévisible du point de vue stratégique. Non, le pire provient du jugement du peuple qui a subi le génocide. En effet il a tendance à se dénigrer et à considérer qu’il n’est pas valable de mettre en application ses rêves, ses visions et ses objectifs. Or rien n’est moins faux que tout cela. Penser cela va dans le sens du dogme du bourreau. Seulement dans le peuple, il y a toujours des hommes, des guerriers de la paix qui sont capables d’inspirer la confiance des victimes et de leur donner les moyens de mener à bien leur cause. Même si ces hommes sont rares comme l’affirme la propagande, ils suffisent à mettre en place une stratégie de défense capable de remettre en cause la suprématie du bourreau. Si ces hommes parviennent à transcender les obstacles du peuple victime face à sa propre mentalité, c’est qu’ils obéissent à des schémas mentaux bien plus anciens et bien plus profonds que le génocide. Car ils savent que le génocide n’est que la preuve de leur valeur en tant que peuple. La victime ne devient victime qu’en raison de sa valeur.

http://www.lygeros.org/articles?n=2690&l=fr

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Toujours là ! N. Lygeros

Lorsque les barbares nous accusent 
nous savons que nous sommes innocents 
mais que devons-nous répondre 
aux critiques de nos propres enfants ? 
Ils pensent comme ils veulent qu’ils pensent 
sans comprendre qu’il ne s’agit de pensée. 
Même après le génocide la barbarie a peur 
car elle sait que nous existons toujours.

http://www.lygeros.org/articles?n=2692&l=fr

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Les larmes du dragon
N. Lygeros

Notre peuple était dans le temps 
un immense champ de fleurs. 
Trop belles pour la barbarie. 
Aussi elle faucha les magnifiques 
pour ne laisser que les sauvages. 
Seulement parmi celles-ci 
se trouvaient les immortelles. 
Et chacune d’entre elles 
avait conservé 
le souvenir du dragon. 
Comme il savait qu’elles seules 
résisteraient à la barbarie, 
il les avait gorgées de larmes.

http://www.lygeros.org/articles?n=2694&l=fr


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L’essence du peuple
N. Lygeros

Chaque peuple n’a que la valeur qu’il mérite. 
Il ne sera jamais à l’abri des traîtres, 
pas même des lâches ou des vils 
mais cela ne remet rien en cause 
s’il possède des hommes libres. 
Ils sont sa valeur et sa dignité. 
Leur rareté est une réalité 
mais qu’importe, l’essentiel est leur œuvre. 


http://www.lygeros.org/articles?n=2695&l=fr

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 Conférence par Nikos Lygeros 
Zéolite et Viticulture
St Lager, 31/01/2014 

http://www.lygeros.org/Talks/20140131_saintlager.html

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Le cénotaphe barbare
N. Lygeros

Ils ne se contentent plus de souiller les églises, 
Ils veulent s’approprier notre mémoire. 
Ils ne se contentent pas de commettre un génocide, 
Ils veulent effacer toute trace de notre civilisation. 
Le musée n’est qu’un stratagème, un prétexte, 
Ils préparent non seulement le mausolée 
Mais aussi le cénotaphe de notre peuple.


http://www.lygeros.org/articles?n=2706&l=fr


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De la restauration à la récupération
N. Lygeros

- Ils ont restauré l’église. 
- Je ne vois pas la croix. 
- Ne sois pas cynique. 
- Que dois-je dire alors ? 
- C’est un pas vers la paix. 
- C’est aussi un pied dans la tombe. 
- Est-ce un mal de restaurer ? 
- Ce qui est mal c’est la récupération. 
- Elle se trouve dans leur pays. 
- Car ils occupent le nôtre ! 
- Ils acceptent que nous existions. 
- A condition d’être privés de mémoire. 
- Tu es trop dur. 
- As-tu un autre moyen de lutter contre le négationnisme ? 
- Faire la paix. 
- La paix revient aux morts. Nous avons besoin de liberté. 
- Il faut oublier. 
- Tout le monde ne peut porter une croix. Mais un seul a suffi.

http://www.lygeros.org/articles?n=2708&l=fr

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Histoire imprescriptible
N. Lygeros

Dans la lutte pour la reconnaissance d’un génocide, les défenseurs des droits de l’homme se basent sur la notion de crime imprescriptible. Ce sont les crimes de guerre et les crimes contre l’humanité qui ont rendu nécessaire cette idée. Si elle est si essentielle, c’est qu’elle représente un outil juridique formidable. Seulement son importance ne doit pas nous faire oublier le rôle que doivent jouer les peuples qui ont subi un génocide. En effet ces derniers ne peuvent se contenter d’agir comme les défenseurs des droits de l’homme. L’action de ceux-ci se concentre sur les effets, ils travaillent dans l’a posteriori. Tandis que les peuples victimes connaissent les causes et ils doivent aussi œuvrer dans l’a priori. Il ne s’agit donc pas de lutter, du moins pour eux, uniquement contre un crime imprescriptible mais avant tout d’écrire une histoire imprescriptible. La victimisation engendre une prise de conscience, c’est celle de la disparition potentielle, c’est celle de la quasi-disparition réelle. Le peuple génocidé ou du moins ses survivants, sait ce qu’il a failli subir mais aussi ce à quoi il a échappé. Il est donc conscient doublement de sa valeur aussi bien par la perte que par la nécessité. 

Il est donc extrêmement dangereux pour un peuple qui a été victime d’un génocide de caler l’ensemble de ses revendications sur la problématique de la reconnaissance du génocide et donc du coup jouer uniquement le rôle des défenseurs des droits de l’homme. Une stratégie de ce type est l’aveu d’un échec interne à savoir le développement de sa propre entité. Les Arméniens, les Grecs, les Juifs ou les Ukrainiens ne peuvent uniquement se définir comme des peuples ayant subi un génocide. Ces peuples ont une culture, une langue, un patrimoine. Ce sont ces caractéristiques qui ont été la cible de la barbarie. Si le peuple a subi un génocide, c’est qu’il est porteur de ces valeurs. Se concentrer uniquement sur la reconnaissance du génocide en oubliant ces valeurs, revient à clore l’acte de barbarie mais aussi l’histoire. Les survivants ne sont pas que cela. Ils sont avant tout la trace de quelque chose qui a failli disparaître et cette chose ce n’est pas le génocide mais une véritable civilisation. Si les défenseurs des droits de l’homme ont un devoir de mémoire, les survivants ont un devoir de civilisation. Le génocide est un acte barbare non seulement en tant qu’agression humaine, il l’est aussi car il a tenté d’effacer une civilisation. 

L’histoire imprescriptible n’est donc pas seulement une extension de la notion de crime imprescriptible, elle est le noyau de ce concept. Cette mise en exergue montre le danger de réduire le devoir de civilisation au devoir de mémoire. Il s’agit d’une stratégie qui dégénère en acceptation d’un état de fait. Le génocide a détruit une entité et il doit être condamné pour cela. Seulement nous oublions souvent que cette entité existe toujours aussi elle doit revendiquer son droit d’exister via son devoir de civilisation. Car ce ne sont pas les défenseurs des droits de l’homme qui aideront à la survie de la culture, de la langue et du patrimoine mais les survivants. 
http://www.lygeros.org/articles?n=2720&l=fr 


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Droit d’ingérence et génocide de la mémoire
N. Lygeros
Un des problèmes techniques de la lutte pour la reconnaissance d’un génocide, c’est celui de l’absence du droit d’ingérence. En effet, ce dernier si clairement défini du point de vue juridique dans le domaine de l’humanitaire, se base sur la notion d’urgence. Certes celle-ci dépend directement de la situation conflictuelle et de la résistance d’une structure étatique ou pas à accepter ou tolérer une aide extérieure. Mais elle est essentiellement ancrée dans le présent. Le problème du génocide lorsqu’il est dans la phase de la reconnaissance, c’est qu’il appartient au passé. Aussi la notion d’urgence n’a pas lieu d’être, du moins dans le contexte diplomatique. Il n’est donc pas aisé d’introduire le droit d’ingérence et celui-ci apparaît comme un outil exotique dans ce cadre. 
Seulement la lutte pour la reconnaissance d’un génocide ne s’active pas autour du génocide lui-même, parce qu’il s’agit d’un fait historique sur lequel ne reviennent ni les survivants ni les défenseurs des droits de l’homme. La lutte concerne ce que nous désignons par l’expression "génocide de la mémoire". En effet tout se passe essentiellement dans la huitième phase du processus génocidaire. L’état ou la structure qui a commis le génocide refuse d’endosser non pas les responsabilités de l’époque mais du présent. Ceci est général car les régimes changent même si les bourreaux ont le sens du devoir et du travail bien fait même lorsqu’il s’agit d’actes de barbarie. Aussi l’accusation qui est héréditaire concerne toujours l’état actuel. Dans ce cadre plus concret et temporel, la notion d’urgence reprend du sens. Elle permet alors de contextualiser le droit d’ingérence. Cela ne s’applique donc pas au génocide proprement dit puisqu’il appartient au passé, mais au génocide de la mémoire. 
Nous devons donc préciser ce que nous entendons par urgence dans ce nouveau contexte. Contrairement à ce que nous aurions tendance à penser, il n’y a rien d’abstrait dans cette précision. L’urgence peut provenir de la destruction systématique d’un cimetière, de la récupération de la restauration d’une église, de la modification du code pénal, des sanctions à l’encontre des journalistes ou même de l’assassinat de certains d’entre eux ou du changement de religion imposé par un régime autoritaire. Ce sont des cas concrets que nous avons à l’esprit. La généricité de la terminologie n’est là que pour démontrer l’applicabilité à plusieurs génocides. Cette situation d’urgence existe donc. Aussi il est nécessaire de mettre un cadre juridique léger qui permet des interventions ponctuelles pour sauver ce qui peut encore l’être. 
Cette mise au point se veut une ouverture sur la voie à suivre pour ne plus se contenter de subir la huitième phase du processus génocidaire. Le génocide de la mémoire représente une neuvième phase qui a ses propres caractéristiques. Nous devons la rendre explicite pour lutter efficacement contre elle car l’état d’urgence existe aussi nous devons introduire et appliquer le droit d’ingérence dans cette nouvelle configuration. 


http://www.lygeros.org/articles?n=2721&l=fr


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A l’esprit du combattant
N. Lygeros

Je savais que tu étais près de ton ami 
emprisonné dans la liberté factice 
et je ne pouvais m’empêcher de penser 
ce que serait ta patrie sans des hommes 
comme toi qui pouvaient tenir 
des positions perdues, des églises abattues 
et des ponts délabrés pour sauver 
l’avenir de la terre de tes ancêtres.
http://www.lygeros.org/articles?n=2724&l=fr

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Interdiction de pénaliser
N. Lygeros

Certains ont du mal à rendre la justice, 
ils préfèrent l’instauration de l’injustice. 
Ils ne parlent que de pénalisation 
pour créer une nouvelle confusion. 
Ils n’osent parler de génocide de la mémoire 
car ils ont bien trop peur de l’histoire. 
Quant au crime contre l’humanité, 
ils choisissent de ne pas le mentionner. 
Alors que la pénalisation n’est pas une interdiction 
mais le pouvoir de refuser la trahison.


http://www.lygeros.org/articles?n=2738&l=fr

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La nécessité du discours stratégique
N. Lygeros

Il ne suffit pas de défendre une cause juste pour être juste. Il ne suffit pas de construire un monument pour être un architecte. La lutte pour la reconnaissance du génocide des Arméniens le prouve. Et la création du Mémorial Lyonnais montre ce qu’il est possible de faire dans un endroit stratégique. Cette configuration cependant implique une continuation. Le choix du site, la réalisation, l’esthétique et l’impact doivent former un tout cohérent. Dans le cadre du Mémorial Lyonnais pour le génocide des Arméniens, cette cohérence a été obtenue. Seulement cette cohérence doit être soutenue par un discours stratégique. 

Nous parlons certes des évènements de 1915, en englobant l’ensemble des crimes commis entre 1896 et 1923. Mais le régime turc actuel continue de bafouer les droits du peuple arménien. Il ne reconnaît toujours pas le génocide mais nous ne transformons pas cette reconnaissance en une condition sine qua non. Il intervient dans la politique française pour promouvoir sa propagande alors que nous n’avons toujours pas voté la loi pour la pénalisation en raison du report de séance. Les extrémistes assassinent un catholique mais l’église ne fait que s’offusquer. Ils assassinent un journaliste d’origine arménienne mais nous ne réagissons qu’en prononçant des discours consensuels. Ils torturent et égorgent trois protestants mais nous nous contentons de crier haut et fort que c’est inadmissible sans rien faire de plus. Ces hommes ont été lacérés de dizaines de coups de couteaux. Ils ont eu leurs doigts coupés jusqu’à l’os. Ils ont subi les pires sévices sur leurs parties génitales et leur anus alors qu’ils étaient simplement protestants. Que faut-il attendre de plus de la part du régime turc et des extrémistes soutenus par sa propagande pour se révolter ? Nous avons des faits terribles et horribles de nos jours sous un régime qui se prétend démocratique et laïc, et nous en sommes encore à nous demander si la pénalisation de la non reconnaissance du génocide des Arméniens doit être effectuée. Nous nous interrogeons sur le rôle du politique dans l’histoire. Nous examinons des problèmes de conscience alors que la barbarie est à nos portes et demande à rentrer. 

Chypre qui est un membre de plein droit de l’Union Européenne n’est toujours pas reconnu en tant qu’Etat par la Turquie, et nous entendons encore certains parmi nous, comme les collaborateurs d’un autre régime à une autre époque, nous dire que nous devons être patients, que la Turquie ne cesse de changer, qu’elle minimise l’utilisation de la torture, etc. Nous devons prendre conscience que ce n’est plus une question de conscience que de lutter contre un régime autoritaire de propagande, c’est une question de devoir de mémoire et de dignité humaine. Les Arméniens, les Assyro-Chaldéens, les Chypriotes et les Grecs ont encore des mémoires torturées. Devons-nous attendre qu’elles disparaissent elles aussi pour agir ? Devons-nous attendre la fin du génocide de la mémoire pour réagir ? Rien n’a changé, rien ne changera, à moins que notre lâcheté se transforme en courage et notre inertie en changement dynamique. Tel est l’objectif.

http://www.lygeros.org/articles?n=2780&l=fr


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Levés de Bras
N. Lygeros

Levés de Bras, Mains Ouvertes, la Dignité humaine criait Dans Le silence. 
Loin du ciel, à Peine sur terre, l'homme n'était qu'un linceul en plus. 
Privé de Tout, meme de la mort, le démuni cherchait la Solidarité. 
H sans alphabet, sans pièce échecs, la solitude vivait Dans La mort. 
Ombre d'épi non fauché, L'Humanité résistait à la barbarie. 
http://www.lygeros.org/articles?n=2773&l=fr

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Barbarie turque
N. Lygeros

La barbarie turque s’est abattue sur trois hommes 
car elle s’est sentie menacée par l’évangile. 
Heureusement pour la survie de la laïcité 
les chrétiens ont été torturés, lacérés et égorgés. 

La barbarie turque est rassurée à nouveau 
car la relève est assurée grâce au tranchant 
qui avait massacré les Arméniens et les Grecs 
car personne n’ose pénaliser cette démocratie.

http://www.lygeros.org/articles?n=2775&l=fr

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Génocide versus désinformation.
N. Lygeros

L’un des problèmes fondamentaux des défenseurs des droits de l’homme dans le cadre de la lutte pour la reconnaissance d’un génocide et encore plus dans celui de la pénalisation de la non reconnaissance, c’est la désinformation. Celle-ci peut être passive ou active, défensive ou agressive. Dans tous les cas, la désinformation impose une méthodologie. Aucune sensiblerie n’est de mise, pas même une forme implicite de sensibilisme. Ceci est évidemment très difficile pour les familles et les proches de victimes et ce, d’autant plus qu’il s’agit de survivants dans le cas d’un génocide. Nous devons aussi être conscients que tous les faits produits seront contrôlés à nouveau par la désinformation afin de s’en servir comme plate-forme de propagande. Il est donc nécessaire de réduire les éléments apportés à l’accusation de génocide et plus généralement de crime contre l’humanité, à un noyau irréductible, en d’autres termes incontestable. Ceci présuppose un choix des affaires à conduire. 

Afin, d’être concrets, dans un cadre plus large qui n’appartient pas à celui du génocide, nous pouvons traiter le cas des disparus de Chypre. Pendant des années, les gouvernements successifs de la Turquie ont refusé l’existence même des 1619 disparus. Lorsque nous avons eu à traiter certains de ces cas pour la Cour Européenne des Droits de l’Homme, nous sommes entrés en relation avec la commission des disparus chypriotes. A la suite de cette rencontre, nous avons choisi uniquement 700 cas à traiter. Cela ne signifie pas pour autant que les autres cas n’existent pas. Seulement pour les 700 cas, nous étions capables de fournir toutes les preuves nécessaires pour démontrer la culpabilité de l’armée turque quant à la disparition de ces personnes. L’inconvénient de cette méthode, c’est que certaines familles chypriotes peuvent avoir l’impression que nous ne défendons pas leur cas. L’avantage c’est que le choix effectué a permis la réalisation d’un noyau incontestable qui n’offre aucune prise à la désinformation turque. Aussi la culpabilité de la Turquie a pu être démontrée de manière efficace. 

Il est certes difficile de mettre en place des tactiques analogues dans le cadre du génocide qui est avant tout un évènement global. Cependant même un génocide peut être analysé, soit dans un champ temporel, soit dans un champ géostratégique. Il est alors possible de mettre en évidence des regroupements judicieux de cas incontestables de manière à constituer non plus un noyau, mais un réseau multilocal capable d’affronter le processus de désinformation. Car la désinformation se base essentiellement sur l’adage populaire à savoir, semer le doute, il en restera toujours quelque chose. Pour les défenseurs des droits de l’homme, il s’agit de jouer en contrepoint par rapport à cela i.e. sauvegarder l’essentiel de l’information afin qu’il en reste toujours assez pour accuser les bourreaux. 

Pour toute reconnaissance, l’appareil en place, le continuateur du génocide, le responsable du génocide de la mémoire, tentera toujours de minimiser l’envergure de notre action, en réduisant certains arguments à néant, en effaçant les traces, en contestant les chefs d’accusation. Dans tous les cas nous devons résister, garder en tête l’action des justes et ne jamais oublier que sans efficacité même les victimes peuvent disparaître.

http://www.lygeros.org/articles?n=2766&l=

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Dialogue asocial
N. Lygeros

- Quand cesseras-tu d’écouter ces chansons ? 
- Quand le monde deviendra réel. 
- Il ne changera pas. 
- Nous continuerons néanmoins à créer. 
- La société n’a que faire de cela. 
- Nous ne le faisons pas pour elle. 
- Pour qui alors ? 
- Pour l’humanité. Seulement pour l’humanité. 
- C’est une abstraction. 
- Cela ne signifie pas qu’elle soit un non sens. 
- C’est vrai mais est-ce utile ? 
- Qu’importe l’utile ! 
- Mais alors ? 
- Le beau suffit ! 
- A qui ? 
- Au vrai. 
- Comment peux-tu penser être dans le vrai ? 
- Car je n’appartiens pas à la societé du bonheur. 
- Il n’en existe pas d’autre. 
- Je le sais bien. 
- Je ne saisis pas ta question. 
- C’est celle de la résistance. 
- Contre qui ? 
- Le rire de dieu. 
- Tu es complètement ivre. 
- J’ai bu trop de silence. 
- Tu en as perdu la tête. 
- Mais pas la parole ! 
- Qu’insinues-tu ? 
- Je pense qu’il devrait avoir des remords. 
- Pourquoi ? 
- Face au génocide. 
- Quel génocide ? Le temps efface tout. 
- Le temps n’efface rien, ce sont les gens qui oublient. 
- Ne parle pas de mémoire. 
- Car elle est interdite par la société ? 
- Prière de ne pas déranger... 
- Exactement ! 
- Ne compte pas sur moi. 
- Tu seras condamné. 
- Je suis né ainsi. Condamné à vivre. Aussi je ne crains pas de vivre pour être condamné.
http://www.lygeros.org/articles?n=2862&l=fr

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Les mots arméniens
N. Lygeros

S’il fallait expliquer l’importance de la langue arménienne 
quelques mots à peine suffiraient. 
Il faudrait dire que l’emploi de sept mots était un blasphème, 
il faudrait parler de l’institutrice à la langue coupée 
il faudrait se taire pour que les hommes entendent 
le cri d’une bouche ouverte sans langue.

http://www.lygeros.org/articles?n=2776&l=fr

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L’essence de l’instant
N. Lygeros

Comment vivre malgré les défaites ? 
Comment supporter les génocides ? 
Sans sombrer dans l’indifférence. 
Sans se noyer dans la bêtise. 
Il suffit de voir un ami pleurer. 
Sans comprendre, nous reprenons le dessus. 
Sans le saisir, nous ne pouvons l’abandonner. 
Comment aimer l’humanité ? 
Comment mourir malgré les victoires ?

http://www.lygeros.org/articles?n=2864&l=fr

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 Existence interdite
N. Lygeros

Nous ne disions rien 
car il fallait se taire. 
Ils ne devaient pas nous entendre. 
Notre existence avait été interdite. 

Nous étions des bougies 
qui ne pouvaient s’allumer. 
La barbarie ne supportait la lumière. 
Notre mémoire de cire s’était pétrifiée.

http://www.lygeros.org/articles?n=2860&l=fr

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http://ellinoarmeniki-filia.gr/

Des textes  Nikos Lygeros - en Grec et en Français

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Les petites choses
N. Lygeros

Dans la vie quotidienne de l’oubli, 
nous n’accordons guère d’importance 
aux petites choses qui nous rendent humains. 
Nous sommes persuadés de faire l’essentiel 
mais sans réaliser sa futilité 
et son insuffisance à mourir pour les autres. 
Nous ne prenons conscience de notre état 
que lorsque nous affrontons un génocide 
qui tente d’effacer à jamais les petites choses. 

Car les petites choses ce sont les hommes. 
Tout système barbare le connaît. 
Tandis qu’il nous faut la résistance pour le comprendre. 
http://www.lygeros.org/articles?n=2939&l=fr

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La nonchalance des bras tatoués
N. Lygeros

En examinant les images du passé 
où ne dominent que le noir et blanc, 
nous sommes surpris par la nonchalance 
des êtres condamnés par l’époque 
des régimes de la barbarie. 
Ils sourient comme si de rien n’était, 
ils persistent à vivre dans la mort 
malgré les horreurs de la société 
et la dureté de l’histoire barbare 
même lorsqu’ils deviennent des bras tatoués.
http://www.lygeros.org/articles?n=2940&l=fr

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La société de la lâcheté
N. Lygeros

Nous acceptons l’existence des génocides 
mais nous sommes toujours aussi racistes 
envers les mêmes peuples avec la même haine 
car la société de l’oubli nous enseigne 
les mêmes sentiments d’horreur. 
Nous pensons que ces peuples sont des victimes 
car ils sont nés sans force de vaincre. 
Nous ne supportons pas leur faiblesse 
parce qu’elle nous rappelle la nôtre. 
Aussi nous les oublions en faisant de notre mieux 
grâce à l’aumône de notre racisme. 

http://www.lygeros.org/articles?n=2941&l=fr

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La grandeur d’Eugénie
N. Lygeros

Elle n’avait jamais eu le ventre rond. 
Elle était née trop tard pour cela. 
Pourtant ses souvenirs avaient été blessés. 
Née après la mort, elle devait vivre, 
malgré tout, malgré ceux qui la haïssaient. 
Ses recherches quotidiennes n’avaient qu’un but : 
La reconnaissance des ventres ronds. 
C’est dans la misère de la société 
que la grandeur d’Eugénie naquit.
http://www.lygeros.org/articles?n=2945&l=fr

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La négation de face
N. Lygeros

Il est rare de voir 
la négation de face. 
Sournoise, elle louvoie 
à travers les esprits 
sans se montrer. 
Alors quand nous avons 
la chance de la voir 
il faut en profiter 
car nous devrons lutter 
contre son œuvre.

http://www.lygeros.org/articles?n=2947&l=fr

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Négociations utopiques
N. Lygeros

Certains Arméniens sont tellement persuadés de n’être que des victimes qu’ils ne peuvent réaliser leur propre victoire. L’existence des territoires libérés n’est pas une hypothèse de travail mais un fait incontestable. Et il n’est pas nécessaire d’être stratégiste pour réaliser leur importance vis-à-vis de l’Arménie. Il ne s’agit pas simplement d’une double enclave comme nous pourrions le penser au premier abord. C’est un dipôle organique et une stratégie à deux piliers. Au-delà du pont aérien, la liaison est réelle et non formelle. Elle permet de plus de démontrer que même au sein des mouvements tectoniques sur le plan géostratégique de la région, il est possible non seulement de résister mais aussi de créer. Ceci s’explique par le fait que nous sommes dans une région hors équilibre, pour emprunter la terminologie de Prigogine. Aussi il est possible de créer des enclaves à entropie négative. Ces structures peuvent de plus être robustes c’est-à-dire résistantes aux attaques extérieures. Le problème n’est donc pas une question de faiblesse. Le Haut-Karabagh n’est pas un point faible de l’Arménie mais un véritable bouclier tactique. C’est un point d’appui qui ne peut et ne doit être abandonné. Aussi les négociations sur ce point sont tout simplement utopiques si ce n’est absurdes. La perte des territoires libérés n’est pas seulement un sacrifice pour la stabilité. C’est un véritable échec stratégique. Car la reconfiguration des frontières ne permet pas un redéploiement effectif des forces arméniennes. Au contraire, elle les fragilise car les positions à tenir deviennent littéralement irréalistes. Mais le point sans doute le plus important c’est que nous offrons à l’ennemi, l’occasion de redisposer ses forces de manière plus efficace et surtout plus agressive vis-à-vis de l’Arménie. Alors que nous sommes en présence d’un dogme stratégique unifié, sous prétexte de stabilité de la région, nous voulons le remettre en cause. Seulement la dégénérescence de cette structure n’est pas uniquement une faille dans le système de défense arménien mais un véritable renforcement de l’alliance azéri-turque. La stabilité provient d’un principe auto-bloquant dans la région et n’est pas sous-jacente à la perte des territoires libérés. Nous devrions donc plus nous intéressés au statut des territoires occupés que de cette perte. Car l’existence même des territoires libérés permet de prouver de facto que les territoires occupés ne sont pas une condamnation inexorable. Faudra-t-il attendre l’existence officielle du Kurdistan pour que certains Arméniens comprennent enfin que l’impensable est réalisable ? Ou diront-ils encore que la situation n’est pas comparable ? Comment leur faire comprendre que la survie au génocide est la preuve la plus éclatante que le peuple arménien n’est pas condamné à être une victime éternelle ? Ce moyen existe et c’est la conservation des territoires libérés dans la pensée stratégique arménienne.
http://www.lygeros.org/articles?n=2949&l=fr

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Sur le partitionnement artificiel du génocide
N. Lygeros

La recherche des responsables d’un génocide incite parfois les victimes ou plutôt les survivants à adopter des stratégies inefficaces en raison de leur exaspération devant la lenteur des condamnations. Une de ces stratégies inefficaces consiste à partitionner le génocide de manière à affecter un coefficient à chaque partie afin de mettre en avant le pire des bourreaux. L’inconvénient de cette approche, c’est qu’elle décontextualise la partie de l’ensemble du génocide. Ses partisans répondront sans doute que seule cette partie constitue le véritable génocide sans se rendre compte que de cette manière, la notion de génocide dégénère. Pourtant la problématique et la méthodologie de Staton existent. Les huit phases d’un processus génocidaire permettent de mieux appréhender ce crime contre l’humanité mais aussi d’exploiter ses caractéristiques pour sa reconnaissance. Nous avons à traiter un problème holistique aussi toute méthodologie réductionniste est vouée à l’échec, et ce, par définition. Un autre inconvénient de la méthode de partitionnement du génocide, c’est de laisser croire ses tenants qu’une approche globale diminuerait le rôle et l’impact de chacun. Or c’est précisément cette technique qui est exploitée par des fanatiques de l’oubli lorsqu’ils veulent nier l’existence du génocide. Ils se contentent d’appliquer plus en profondeur cette méthode de manière à obtenir un partitionnement plus fin. Ainsi le coefficient de chacun de ses responsables de ce crime contre l’humanité est tellement minime qu’il ne permet pas l’établissement d’un acte d’accusation. Aussi les responsables ne sont plus coupables. Un génocide ne peut être partitionné. C’est un processus global car il est analogue à ce que nous nommons en stratégie une guerre totale. Bien sûr, il ne s’effectue pas dans les mêmes conditions mais il a essentiellement le même but. Il est la résultante d’un ensemble de dispositifs qui vont tous dans le même sens, à savoir la destruction systématique d’un peuple. Seulement, il ne faut pas se leurrer, cette destruction ne vise pas seulement les hommes, mais aussi leur mémoire et plus généralement tout ce qui représente leur culture. Nous devons donc être plus attentifs au moindre signe qui annonce des tentatives qui vont dans le sens de cette horrible entreprise. La réduire simplement à la phase de l’élimination ne permet ni de la comprendre, ni de lutter efficacement contre elle quant au problème de la reconnaissance. Enfin, le dernier problème du partitionnement artificiel du génocide, c’est de remettre en question la possibilité même d’une pénalisation car le spectre de cette dernière est si restreint par cette approche qu’il en perd sa valeur intrinsèque. Et ceci le transforme non seulement en un outil inefficace mais surtout en un outil qui n’a pas lieu d’être. Or nous savons combien la pénalisation est une étape importante dans le processus de réparation qui est la seule réponse à l’ampleur du génocide. Remettre en cause la validité et l’efficacité de la pénalisation revient à remettre en cause l’ensemble du processus de réparation. Il ne s’agit donc pas d’une simple erreur méthodologique que de partitionner le génocide mais d’une véritable erreur stratégique qui a des conséquences sur l’ensemble de la lutte des guerriers de la paix. 
http://www.lygeros.org/articles?n=2957&l=fr

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La mer Adriatique et la mer Ionienne comme axe de la ZEE
N. Lygeros
Traduit du Grec par A.-M. Bras
La mer Adriatique et la mer Ionienne, ne sont pas seulement deux zones qui se jouxtent, mais aussi un passage historique qui n'est pas lié exclusivement à la Grèce et à l'Italie, puisqu’il concerne aussi simultanément les pays de l'ex-Yougoslavie et de l'Albanie. Ces pays constituent globalement un trou de nature topologique pour l'Union Européenne et sont en phase d'intégration en tant que pays candidats. Il est donc important de combiner ce thème avec celui de la délimitation de la ZEE dans la région. Car la mer est l’agent de liaison au niveau de l'Union européenne. Par conséquent, il ne faut pas faire l'erreur de les considérer comme des objets distincts. Autrement, nous devrons supporter le coût de l'absence de coordination. Ainsi, la mer adriatique et la mer Ionienne jouent non seulement en tant que mer mais aussi terre ferme. Par conséquent, nous avons la stratégie maritime et la géostratégie qui concordent. Cette perception commune nous donne la possibilité de développer une conception de stratégie de haut niveau pour l'Union Européenne, ce qui améliore l'ensemble du champ de jeu et évite typiquement une intervention quelconque basée sur des arcs qui n’ont pas de flèches. L'Union européenne connaît la région, mais pas aussi bien que la Grèce elle-même. Dans ce contexte, nous pouvons jouer un rôle dynamique, non seulement en tant que fer de lance mais aussi comme fond stratégique en contact direct avec la Méditerranée orientale où apparaît l'axe horizontal diachronique.
http://www.lygeros.org/articles?n=14423&l=fr

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Réflexions sur le sens du 24 Avril 1915
N. Lygeros

La concentration de tout notre espace de réflexion sur un seul jour même si c’est le 24 Avril 1915 ne nous permet pas de comprendre la véritable dimension du génocide des Arméniens. Il est vrai que cela est dit par certaines personnes parmi les plus efficaces dans la lutte pour la reconnaissance néanmoins leurs paroles restent lettre morte aussi nous avons décidé d’aborder le problème de ce schéma mental d’une tout autre manière. Nous avons choisi le théâtre d’opérations des Balkans afin de ne pas être trop éloignés du contexte plus général. Imaginons alors que nous sachions que le 2 Janvier 1915, le grand-duc Nicolas fit appel à Kitchener et lui demanda une diversion pour alléger la pression qu’exerçait la Turquie sur les armées russes du Caucase. Certains spécialistes du génocide des Arméniens ne manqueront sans doute pas de faire le premier lien mais peu importe. Imaginons de plus que nous sachions aussi que Kitchener suggéra une démonstration navale contre les Dardanelles car il ne pouvait fournir des troupes. L’étau se resserre pour l’historien de l’époque. Imaginons enfin que nous sachions que Churchill proposa de convertir cette démonstration en une tentative pour forcer le passage. Á présent imaginons durant quelques instants que nous ne sachions pas même ces informations, comment ferions-nous pour interpréter la suivante décrite par Liddell Hart : 

« Le 25 Avril, les Britanniques partis de l’extrémité méridionale de la péninsule, près du cap Hellès et de Gaba Tépé, à 15 miles environ de la côte égéenne, firent un premier bond en avant. Les Français, chargés d’opérer une diversion, débarquèrent un instant à Koum Kaleh, sur la rive d’Asie. Mais dès qu’eut fini de jouer l’atout fugitif de la surprise tactique et que les Turcs purent amener leurs réserves, les envahisseurs ne purent étendre ces précaires têtes de pont. » 

Il n’est pas difficile d’imaginer que dans la configuration cognitive dans laquelle nous nous sommes consciencieusement placés, il nous est tout simplement impossible de transformer ces informations en connaissances exploitables. Ainsi nous voyons dans un contexte relatif spatialement et compatible temporellement que nous ne pouvons décontextualiser l’information sans qu’elle ne dégénère. Or c’est exactement ce que nous faisons via le confinement immémorial du 24 Avril 1915. Cette date est certes un symbole car elle est chargée d’une valeur historique et humaine, néanmoins nous devons prendre garde à ne pas transformer le rôle d’un symbole et le rendre symbolique. Car un symbole symbolique n’a plus d’impact. Sa valeur ayant disparue, il ne peut être l’élément moteur d’une cause. Aussi il devient la mémoire d’un oubli. Il est donc nécessaire de conserver un espace mémoriel plus important qu’une simple date pour lutter efficacement contre les fanatiques de l’oubli et les barbares de l’horreur. 

http://www.lygeros.org/articles?n=2954&l=fr

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Garde du corps
N. Lygeros

Au milieu des innocents morts 
le vishap se tient seul. 
Malgré sa mort 
il est aux côtés 
des survivants. 

Il avait promis de les protéger 
même si l’ombre du papillon 
ne touchait plus le front 
de la liberté 
de mourir. 
http://www.lygeros.org/articles?n=3128&l=fr

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Au dessus de la musique
N. Lygeros

Pour partager le repas, 
il fallait un monde nouveau. 
Alors nous écoutâmes la musique, 
celle des combattants de la paix 
et nous retrouvâmes grâce à elle 
les instants d’antan afin d’aimer 
à nouveau et une dernière fois 
ce que le dragon nous avait laissé : 
trois couleurs, quelques croix 
et l’avenir de la mémoire.
 http://www.lygeros.org/articles?n=3060&l=fr

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Sur la route d’antan
N. Lygeros

Plus nous nous enfoncions sur la route chaotique, 
plus nous sentions la présence du dragon. 
Il protégeait la terre et les hommes 
sans rien demander en échange. 
Il n’attendait plus rien 
si ce n’est la vie 
de son peuple. 
http://www.lygeros.org/articles?n=3057&l=fr

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La présence du dragon
N. Lygeros

Sur la terre des pierres 
le souvenir du dragon était présent. 
Son souffle avait gravé la mémoire 
du peuple des croix nouées. 
Seulement cette fois il était revenu 
appelé par la nécessité de créer. 
Les hommes libres devaient livrer un combat 
et il devait être à leurs côtés. 
Car la présence du dragon 
ressusciterait toutes les victimes 
afin que les rêves barbares meurent.


http://www.lygeros.org/articles?n=3049&l=fr

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Sur la rhétorique turque
N. Lygeros

Nous savons tous que la Turquie est un pays civilisé puisqu’elle n’a pas commis de génocide, elle n’a pas détruit systématiquement des peuples. Nous savons aussi que contre toute attente, en Turquie c’est l’armée qui est la garante de la démocratie. A présent nous savons que c’est le candidat islamiste qui sera le garant de la laïcité de son pays. Aussi nous ne pouvons manquer de constater que cette rhétorique ne peut laisser indifférent même les plus indifférents. Ce retournement absurde des choses n’est certes pas dénué d’humour lorsque nous l’analysons avec la désinvolture qui sied. Cependant comment accepter de telles inepties lorsque autour de nous, nous ressentons la présence des victimes du génocide, lorsque nous avons des amis qui ont été maltraités par le régime militaire, lorsque nous connaissons des journalistes qui sont assassinés. Même avec humour, cette rhétorique turque est tout simplement intolérable lorsque nous connaissons les faits historiques. Seulement il faut bien se rendre compte que la réalité turque est pour ainsi dire inconnue de la plupart des gens. Aussi cette rhétorique permet de les toucher car ils n’ont pas conscience qu’elle constitue un oxymore. La réécriture de l’histoire lorsque celle-ci a été effacée ressemble étrangement à l’écriture de l’histoire. Les gens qui n’ont pas accès aux événements vivent dans une virtualité créée par la propagande turque. Sans le réaliser, ils ne réfléchissent qu’à travers le dogme turc. Ce dernier les manipule à outrance au point que les accusations d’Amnesty International ressemblent paradoxalement à un travail de propagande de la part d’extrémistes dans le domaine des droits de l’Homme. Ce qui est tout de même le comble. Lorsque l’Union Européenne montre dans son rapport sur l’état d’avancement des réformes en Turquie, que tout le système est ralenti et n’avance absolument pas selon le calendrier européen, nous entendons les plus ouverts de la population dire que nos critères sont trop durs. Lorsque nous osons parler de critères d’absorption de l’Union Européenne, nous sommes trop excessifs. Dans tous les cas ce sont toujours les autres qui sont en cause et jamais la Turquie qui se pose en victime. Or la Turquie peut tout revendiquer sauf le statut de victime. A présent, les nouvelles tentatives de la Turquie dans le domaine de la rhétorique, concernent directement la population interne. Seulement pour le système turc, il s’agit à nouveau d’un combat avec l’extérieur. Car en Turquie, même la population locale est considérée avec suspicion. En effet, malgré le travail de propagande, la Turquie sait combien sa population est hétérogène. Aussi la moindre perturbation des données sur la laïcité peut avoir des répercussions considérables. Il s’agit donc de la convaincre afin qu’elle accepte cet état de l’absurde où règne l’oxymore politique. Peu importe ce que disent les observateurs prétendument indépendants, la réalité c’est que la Turquie est en pleine crise. Ses tentatives de le cacher ne trompent que ceux qui le veulent bien mais la réalité orientale ne change pas.
http://www.lygeros.org/articles?n=3156&l=fr

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Les veilleurs d’avenir
N. Lygeros

Si certains tentent de réécrire l’histoire 
c’est qu’ils en ont oublié son contenu. 
Mais c’est aussi que la culpabilité les ronge. 
Ils revoient dans leurs cauchemars, 
nos enfants enceintes de leur propre mort 
montrant du doigt la barbarie d’un régime 
qui ne connaît que la faim pour se faire aimer. 
Seulement nous veillerons même démunis 
à ce que l’avenir ne voit pas l’oubli du passé 
mais la reconnaissance du génocide. 

http://www.lygeros.org/articles?n=3155&l=fr

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Les marques de la barbarie
N. Lygeros

Ne pleure pas, mon ami, 
si les marques de la barbarie 
frappent à nouveau tes feuilles de pierre. 
Tu les as faites à l’image de notre peuple 
et elles peuvent supporter les stigmates 
pour témoigner face à l’humanité. 

Auparavant tu étais seulement innocent. 
Désormais grâce à ton œuvre, 
tu es devenu juste. 

http://www.lygeros.org/articles?n=3154&l=fr

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Des déplacements massifs au génocide
N. Lygeros

Un des problèmes intrinsèques des échanges de population, c’est la notion de déplacement massif. Ceci n’est pas étonnant en soi car elle peut représenter une étape vers le génocide. En effet les déplacements massifs permettent d’une part de manipuler la population déplacée et d’autre part de la mettre en contact avec une autre population qui ne la voit pas de manière positive. La déstabilisation que provoque un déplacement massif sur la population est considérable. Elle perd ses repères non seulement spatiaux mais aussi temporels. Le système lui offre un avenir qui n’est qu’une répétition du présent social en la privant de passé. Cette population doit se reconstruire et intégrer le tissu social d’une autre population pour ne pas subir de phénomène de rejet. Seulement si le déplacement massif a lieu dans des circonstances extrêmes comme le froid pour le génocide des Pontiques ou comme la faim pour le génocide des Ukrainiens, il devient alors véritablement un acte génocidaire. Le système utilisé par le génocideur consiste à augmenter les frictions internes qui apparaissent inexorablement dans la logistique. Cela permet au système d’avoir des effets secondaires dont il n’est pas directement responsable aussi il ne peut facilement être accusé par la suite dans la phase de reconnaissance. Seulement l’analyse du processus génocidaire montre que le déplacement massif est un moyen de restructurer en centralisant les points d’impact. Ainsi les camps d’extermination étaient rendus efficaces par les déplacements massifs. Sans ces derniers, il aurait été tout simplement impossible d’éliminer autant de personnes en si peu de temps. Ainsi le déplacement massif apparaît comme un moyen de rendre systématique une élimination. C’est justement cette propriété qui conduit à la notion de génocide. Il est donc nécessaire de le considérer comme un critère car il peut être employé de manière indirecte. Une façon de faire pour le système consiste à le provoquer via des actes de répression spécifique afin de terroriser la population. Cette méthode a été utilisée le 6 septembre 1955 par le régime turc contre la population grecque de Constantinople, mais aussi au moment de l’invasion turque en 1974, de l’île de Chypre. Même si ces deux cas sont d’une part un pogrom et d’autre part un crime de guerre, ils entrent bien dans un cadre génocidaire. Car malgré la non continuité du phénomène qui permettrait de conduire clairement à la notion de génocide, ce sont des instantanés provoqués dans le même but, à savoir engendrer un déplacement massif qui produit un changement de phase exploitable sur le plan politique. Aussi nous ne devons pas voir dans le déplacement massif une forme raisonnée et raisonnable de résoudre un problème conflictuel. Car cette prétendue résolution n’est qu’une étape critique.

http://www.lygeros.org/articles?n=3241&l=fr

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La condamnation des victimes
N. Lygeros

Nous étions coupables d’exister. 
Nous étions coupables d’avoir faim. 
Nos bourreaux découpaient notre vie 
en fines tranches pour mieux nous la servir. 
Nous étions nés coupables et mourions 
victimes de notre culpabilité. 
Telles étaient les paroles des bourreaux 
et encore aujourd’hui nous les entendons. 
Mais maintenant nous savons résister. 
http://www.lygeros.org/articles?n=3238&l=fr

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Le survivant du temps
N. Lygeros
Le survivant du temps 
attendait calmement son tour. 
Personne ne lui laissa sa place 
mais il ne se plaignit pas. 
Il regardait son cahier 
car il ne voulait oublier personne. 
Lentement il se dressa 
comme un poing silencieux 
et il accusa la barbarie 
au nom de l’humanité. 
Il n’était alors qu’un enfant 
mais c’était un survivant. 
Il était déjà mort une fois. 
Maintenant il serait là. 



http://www.lygeros.org/articles?n=3274&l=fr

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Grains de folie
N. Lygeros

Nous ne sommes pas morts pour une bouchée de pain. 
L’acier sanglant ne la voulait pas pour lui. 
Il voulait nettoyer la terre de l’ivraie. 
Et nous étions les hommes de trop. 
Ainsi nos corps sont devenus l’engrais des grains de folie 
et notre mort, le crime contre l’humanité 
http://www.lygeros.org/articles?n=3273&l=fr

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Le silence de la faim
N. Lygeros

Assis dans le silence, 
la faim dans les entrailles, 
l’enfant recherchait le rêve d’antan 
pour manger une tartine 
et ne pas partir dans l’ailleurs 
le ventre vide. 
Il mordit ses lèvres, 
dévora le silence des hommes 
et sombra dans l’oubli. 

http://www.lygeros.org/articles?n=3272&l=fr

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L’évangile des justes
N. Lygeros

Avec l’écriture carrée, 
les lettres de fer, 
la grammaire latine, 
l’alphabet d’antan 
et le cyrillique, 
nous écrirons l’acte 
qui accusera la barbarie 
d’avoir tué l’humanité.
http://www.lygeros.org/articles?n=3279&l=fr

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Sur l'absence de la présence
N. Lygeros

Sur l’absence de la présence
il est difficile d’écrire
sans avoir en tête
un visage qui nous manque
aussi en voyant tes lettres
je peux saisir le sens
et prendre conscience
de l’importance du geste
qui devient caresse
en raison de la nécessité
d’exprimer le sentiment
et de le réaliser
pour comprendre l’essence
d’une liaison qui n’est pas lien
mais d’un lien devenu liaison
grâce à l’humanité
partagée par deux êtres.

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N. Lygeros
Traduit du Grec par A.-M. Bras

Tu te demandes pourquoi je ne suis pas encore mort. 
Mais qui supportera l’injustice ? 
Tu te demandes si je souffre. 
Je ne connais pas d’autre existence. 
Je ne peux pas te répondre. 
Tu te demandes qui je suis. 
Simplement le signe de l’océan, 
le caméléon du temps, 
le monstre de l’humanité 
le tien.

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La lettre de fer
N. Lygeros

Traduit du Grec par A.-M. Bras

Si j’avais vécu alors 
j’aurais pu te montrer 
la barbarie 
mais alors, j’étais déjà 
mort 
et tu n’étais pas encore née. 
C’est pour cela que je t’écris 
afin que tu lises 
le passé que tu n’as pas vécu, 
l’avenir dans lequel 
je ne suis pas mort 
et que tu puisses devenir 
juste quand tu l’apprendras. 
Au commencement personne 
ne prit garde à la lune. 
Elle n’avait pas l’éclat 
d’antan. 
Personne n’écouta 
le silence des dragons 
et des croix nouées. 
Mais les pierres devinrent corps 
et les corps, arbres 
qu’une hache invisible coupa. 
Et les têtes blessèrent la terre. 
Tu n’as pas entendu le bruit 
que fait la tempe 
quand elle se brise sur la pierre. 
Personne ne peut le supporter 
sauf si c’est la sienne. 
Tu n’as pas d’enfants encore 
et je ne peux pas te décrire 
la mort des autres 
tu ne pourrais t’en attrister. 
Je sais que tu n’es pas 
indifférente, mais tu es si petite. 
Ne pleure pas maintenant. 
Garde les yeux ouverts. 
Tu ne sais pas encore 
et tu ne peux être blessée 
par le mensonge de la barbarie. 
Tu dois d’abord apprendre 
à souffrir. 
C’est seulement ainsi que tu deviendras juste. 
Et cela, seule l’Humanité 
peut te l’enseigner 
car même l’humanité a 
ses limites. 
Tu ne me crois pas, 
je le sais. 
Cela n’a pas d’importance. 
C’est une question de temps 
et le temps est avec nous. 
Un mort 
ne peut pas dire 
des mensonges. 
Ne regarde pas les barbares, 
seules les victimes 
ont besoin de toi. 

Tu entends ? 

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La force de la solitude
N. Lygeros

Nous sommes nés seuls sans le savoir. 
Il nous a fallu attendre la barbarie 
pour comprendre l’ampleur de notre solitude. 
Maintenant en tant que survivants du génocide 
nous sommes à nouveau seuls mais nous le savons. 
Et cette solitude est devenue notre force 
car nous rendons compte seulement à l’humanité.
http://www.lygeros.org/articles?n=3313&l=fr

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La condamnation de la barbarie
N. Lygeros

Personne ne pensait
que nous supporterions une telle injustice
et pourtant nous sommes là.
Malgré la barbarie des tortures
et les souffrances de la faim.
Nous sommes rassasiés de mort
et nous ne craignons plus pour notre avenir
car nous savons que nous n’en avons plus.
Tous nos efforts désormais
auront un seul objectif :
la condamnation de la barbarie.
http://www.lygeros.org/articles?n=3314&l=fr


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Sur le mythe ou l'intelligence de l'histoire
N. Lygeros

L'étude de la culture, puis de l'érudition d'un auteur comme Kornaros à travers son unique oeuvre l'Erotokritos, et enfin celle de son intelligence à travers la création d'un mythe, celui de l'Erotokritos, nous amène à une réflexion sur la nature même du mythe.
La recherche du fondamental et de l'intrinsèque conduit étrangement à la légende. Ce qu'Albert Einstein qualifie de pensée de Dieu, en considérant le reste comme des détails, c'est une façon d'accéder à la légende : un exemple où le générique mène à l'universel. Il existe tout de même une différence fondamentale entre la légende et le mythe : ce dernier peut être créé de façon consciente. Il semble donc qu'une légende générique peut se transformer en mythe universel mais en quoi le mythe peut-il être qualifié d'universel ? N'est-il pas avant tout socioculturel ? Quelle est la méthode employée par l'homme pour caractériser une entité universelle ? 
La clef de voûte de ce type de problème est la notion d'humanité. L'humanité, de par son aspect intrinsèquement diachronique, joue un rôle fondamental dans la transformation de la légende en mythe. Sa diachronicité est déterminante car elle teste la robustesse du mythe (cf. l'Iliade et l'Odyssée de Homère). Du point de vue mental, la structure de l'humanité lui confère la caractéristique d'une sorte de surhomme - sans doute le seul qui ait jamais existé - doté d'une mémoire gigantesque. Il est d'ailleurs tout à fait vraisemblable que cette entité s'identifie avec la perception divine de certaines cultures et la notion naturelle de certaines approches philosophiques. A l'instar de la pensée qui émerge de la complexité du substrat matériel qu'est l'encéphale, l'humanité, en tant qu'entité mentale, émerge de la structure que constitue l'ensemble des hommes. 
La naissance d'une singularité dans le continuum de l'histoire engendre une légende qui peut devenir générique via un processus d'identification. Si cette première phase se stabilise dans le temps elle donne lieu alors à une métamorphose celle de la légende en mythe. L'aspect fondamental de cette transformation est le suivant : la légende est essentiellement une déformation populaire des évènements, une aliénation de l'histoire - une sorte d'idéalisation - alors que le mythe est une abduction créative de l'histoire (pour employer la terminologie de Umberto Eco) et donc, d'une certaine manière, l'aboutissement ultime de l'histoire (cf. le mythe de Prométhée). 
En effet dans le mythe, l'élément universel est omniprésent. Ainsi la mythologie constitue d'une certaine manière l'ensemble des universaux d'une culture historique. Ce qui est remarquable dans la mythologie grecque c'est que ses éléments transcendent la grécité pour devenir universaux. Il s'agit donc d'un phénomène intelligent qui transcende l'historicité du contenu initial et qui réalise abstraitement un concept latent. 
La preuve la plus tangible (car hypocodée) de ce que nous avançons c'est que le mythe peut à son tour créer de l'histoire (cf. le mythe de la prison d'Arétoussa et du lieu-dit à Athènes). Le mythe est donc intimement lié à l'histoire et pourtant, de par sa nature, il est indépendant du temps : propriété remarquable qui contribue à lui rendre un caractère universel. 
Cet aspect universel du mythe en fait un attracteur étrange non seulement pour la psychologie (cf. le complexe d'Oedipe et l'oeuvre de Sigmund Freud) mais aussi pour la philosophie (cf. le mythe de Sisyphe et l'oeuvre d'Albert Camus). Car sur le plan intellectuel le mythe universel est plus riche que l'histoire classique dont il a été extrait. 
Le mythe qui est sans aucun doute l'archétype de l'intelligence de l'histoire c'est le mythe conscient. Par mythe conscient nous entendons l'oeuvre qui est créée, de manière consciente, pour devenir un mythe. Ce type de mythe est plus rare car il provient directement de la pensée (historique, mais pas nécessairement) sans passer par le stade de la légende : sublimation intellectuelle. Dans cette catégorie nous pouvons classer Don Quichotte de Cervantès, Erotokritos de Kornaros et dans une certaine mesure Don Giovanni de Mozart (avec l'influence de Casanova) si le Dom Juan de Molière n'avait pas existé. 
Du point de vue verbal, il est clair qu'aussi bien Cervantès que Kornaros sont dotés d'une intelligence bien au-delà de la norme. Par contre cette appréciation serait bien plus délicate à faire dans le cas de Racine dont la variété du vocabulaire est très faible ; cela conduit donc à une distinction entre une oeuvre due à l'art et une due à l'intelligence. 
Une autre propriété du mythe c'est que même lorsqu'il est conscient il peut dépasser l'idée de son créateur. Ainsi Cervantès a écrit Don Quichotte dans un esprit allant à l'encontre de celui de la chevalerie - avec un modèle d'anti-héros. Pourtant le chevalier à la triste figure a eu un succès dont le statut n'avait pas été prévu par Cervantès et ce succès fut tel, que d'autres auteurs s'emparèrent de ce personnage si bien que son créateur initial dut le faire mourir dans la deuxième partie de son oeuvre. 
Cependant Don Quichotte, malgré sa mort, est toujours bien vivant dans la mémoire de l'humanité. Et c'est sans doute cela la propriété la plus remarquable du mythe universel : son immortalité. Dès l'Antiquité, les hommes ont eu conscience de cela. L'un des cas les plus extrêmes de cette conscience est celui d'Erostrate que Jean-Paul Sartre a analysé dans son oeuvre homonyme. Seulement il s'agit d'un cas négatif car l'analyse d'Erostrate n'était que de premier degré. La contribution n'est sensible que dans les degrés supérieurs où l'intelligence et la créativité sont fondamentales. Ainsi l'apport le plus profond du mythe universel est de mettre en évidence la part d'éternité que comporte en elle l'intelligence.
 http://www.lygeros.org/articles?n=110&l=fr

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Lueurs nocturnes
N. Lygeros

Nous regardions les photographies 
comme si c’étaient des bougies 
qui mouraient dans le temps 
pour éclairer les événements 
qui avaient frappés notre terre. 

Et nous nous demandions 
combien de gens auraient le temps 
de découvrir l’obscurité 
d’un empire barbare 
qui s’était nourri de victimes 
pour devenir la bête immonde.
http://www.lygeros.org/articles?n=3413&l=fr

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La chanson de mon âme de Georges Dalaras
N. Lygeros

La valeur de la chanson n'est due ni aux paroles novatrices, ni aux formes musicales recherchées, ni à l'expressivité et au talent des chanteurs, ni à la technique des maîtres de la musique. Tout cela, bien sûr, c'est sa beauté. Nécessaire et indispensable pour la révéler, nécessaire et indispensable pour que nous ressentions la passion que la beauté provoque... Seulement la beauté est passagère, relative et change comme changent les hommes, les conditions et les situations.
La beauté ne promet aucune durée...
La valeur de la chanson est due au fait que dans les sons musicaux, dans les syllabes et les mots, se résume et se cristallise notre Mythe central. Celui qui est tissé dans les cellules les plus profondes de la mémoire d'un peuple, celui qui définit une patrie entière. C'est lui qui fait que la chanson émeut, charme, soulève, console les forts et les faibles, les initiés et les insoupçonnés. C'est lui qui conserve identique, inchangée l'émotion, la magie, la consolation et la révolte à travers les époques et même à travers les siècles.
Des belles chansons, il en existe beaucoup : nous leur devons la douceur de notre âme.
Des chansons de valeur, il en existe peu : nous leur devons le fait d'avoir une âme.
Lorque l'incohérence, la facilité et l'arrogance de l'époque rejetteront le son créateur de notre musique nationale, nous prendrons alors conscience du grand vide. Si jamais nous sommes coupés de manière essentielle de notre musique traditionnelle, unique par la richesse de son expression, telle qu'elle est passée dans la chanson traditionnelle, populaire et à texte, nous nous apercevrons de notre pauvreté musicale. C'est un devoir pour chaque auditeur de préserver ce son, et un devoir encore plus grand pour chaque musicien grec de le maintenir.
Ce pays a été béni en ayant peu de biens et un surplus d'âme.
Et une force d'âme inattendue qu'il a mise dans ses chansons, qu'il a fait voyager jusqu'à nos jours. Des antiques "chansons de l'hirondelle" aux hymnes du moyen-âge, des chansons traditionnelles, klephtiques, des îles et d'asie mineure jusqu'aux chansons rébétiques et aux chansons à texte. Tantôt voiles ferlées et naufragées, tantôt fières et superbes, contre vents et marées, elles ne nous demandent qu'une seule chose : de les faire voyager.
Passager de ce navire, je rends mes armes au Mythe.
Ainsi que ma mémoire et tout ce que j'ai été capable d'apprendre toutes ces années.
Des morceaux et des extraits de musiques, de lieux et de couleurs.
Parures et dons de l'âme...

http://www.lygeros.org/articles?n=69&l=fr

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De la société de l’habitude au régime autoritaire
N. Lygeros

Comme l’a judicieusement fait remarquer Mackinder, la société se base sur le fait que l’individu est un être de l’habitude. Les grands bourreaux de l’humanité avaient conscience de cela. Les systèmes kémaliste, stalinien et hitlérien se sont d’abord mis à briser les habitudes des peuples qu’ils voulaient soumettre puis réduire à néant. Leur manière d’aborder le problème consistait à réduire l’ensemble de leur civilisation à un ensemble d’habitudes. Ainsi via cette déconstruction de la structure et la réduction à ses éléments, ils étaient capables de remanipuler ces éléments pour les incorporer dans leurs propres structures. Ce démantèlement structurel fait partie intégrante du processus du génocide. Il permet de préparer d’une manière théorique l’extermination physique. Car l’absence de civilisation pour un peuple revient à déshumaniser ses hommes. Et cet intermédiaire est indispensable pour la solution finale. Il est intéressant de constater que sur le plan historique nous avons un processus rétrograde quant à la disparition des régimes autoritaires. Alors que les génocides de 1915, de 1933 et de 1939-1945 représentent une montée vers l’horreur et la barbarie, l’effondrement du régime nazi a précédé l’effondrement du régime communiste qui précède lui-même l’effondrement du régime de l’état profond. Il faut dire que ce dernier a su exploiter tous les aspects protéiformes de la barbarie dès sa naissance puisqu’il s’est transformé successivement de processus hamidien en régime des Jeunes Turcs et enfin en gouvernement kémaliste. La société allemande ne considère plus Hitler comme son créateur. La société russe ne dépend plus de Staline. Tandis que la société turque révère encore Kemal comme son fondateur. Il n’y a donc pas eu de changement de phase véritable. Et cela s’explique par l’absence d’idéologie d’état dans le sens politique du terme. Hitler prônait le nazisme pour le peuple allemand. Staline prônait le communisme pour le peuple russe. Tandis que Kemal prônait la Turquie car il n’y avait pas de Turcs. Il ne s’agissait pas d’une idéologie politique mais d’une raison d’état. Ainsi l’effondrement des grandes idéologies n’a pas affecté la société turque. Pourtant dans l’ensemble de ces génocideurs nous avons des nationalismes. Il faut dire que les habitudes ont du bon dans le monde des bourreaux. Les sociétés indifférentes oublient les victimes des génocides comme elles oublient leurs bourreaux. Tandis que les bourreaux n’oublient pas leur méthodologie surtout si elle n’a pas été remarquée sur le plan international. Toute la structure de la société turque est basée sur l’image de Kemal. Et cette habitude est ancrée dans les mémoires même des démocrates. Même les négociations s’effectuent sous le portrait de Kemal. Quelle serait notre réaction si elles se déroulaient sous le portrait de Hitler ou de Staline? La métamorphose de l’appareil turc nous évite de nous poser cette question. Ainsi nous nous retrouvons dans de nouvelles habitudes créées cette fois par l’appareil de propagande turc. Nous demeurons des démocraties bien sûr, sans réaliser que nous sommes sous influence. Alors que les peuples qui ont subi un génocide connaissent très bien la valeur des détails et des habitudes car ils ont failli perdre leur civilisation même si finalement ils ont dû l’arracher à la barbarie.
http://www.lygeros.org/articles?n=3471&l=fr

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Sur le dragon de fer
N. Lygeros

La légende du dragon de fer était inconnue hors de la terre des pierres. Il faut dire que sans avoir vécu dans ce pays, cette légende devenait incompréhensible. Comment un dragon de fer pouvait-il porter une croix de bois. Les religions avaient la mémoire courte et tout disparaissait dans la légende des siècles, dans la mythologie des hommes oubliés. Cependant la présence du dragon de fer était encore perceptible de nos jours. Comme si elle avait été enclavée dans notre mémoire. Certes la plupart d'entre nous ne connaissait plus la véritable signification du dragon de fer. Après tout,  cela n'avait pas vraiment d'importance, tant que le souvenir du dragon existait. La croix, le souvenir n'étaient que des mots, mais ils sonnaient juste. Assez pour être entendus dans le bruit de la société. Ils étaient puissants comme le silence. Comment pouvait-il en être autrement puisque le dragon de fer avait toujours été silencieux. Même les tortures n'étaient pas venues à bout de sa résistance. Elles avaient tenté de le briser, mais en vain. Il était,  pour ainsi dire, incassable. Aucune explication n'avait été trouvée à ce sujet. C'était comme si le dragon de fer venait d'un autre temps. Bien avant le génocide des siens. À moins que ce ne soit le contraire et que ce ne soit son œuvre qui ait conduit à rechercher le commencement de l'horreur et le moyen de la réparer. Son humanité avait toujours été suspecte pour la société. Humain, trop humain pour elle. Il était capable de souffrir pour plus d'un million d'hommes, aussi cela était insupportable pour elle. Elle aurait aimé qu’il ne puisse dépasser un seuil de douleur. Et pourtant il était le contre-exemple de ce dogme social. Certains y voyaient là, la preuve de sa relation avec les légendaires lettres de fer mais rien n'est moins sûr. Ce qui était certain, c’était son emprise sur les hommes. Il était capable de donner du courage même dans les pires moments, même lorsqu'il n'existait plus aucun espoir. Personne n'avait jamais su où il trouvait cette source de courage. La nécessité suffisait-elle? Qu'importe après tout, l'essentiel était ailleurs. Pourquoi toutes ces questions sur l'être puisque l'œuvre existait. L'histoire n'était pas morte. Pas plus que Dieu malgré l'horreur du génocide. Les hommes de la terre des pierres continuaient à créer malgré la barbarie et l'oubli. Les sociétés pouvaient nier ce qu'elles voulaient, le dragon de fer montrait l'œuvre de l'existence et surtout l'existence de l'œuvre. Tout n'était pas permis, cela était certain désormais. Et il en était ainsi pour le crime contre l'humanité. Il ne s'agissait pas seulement de dire qu'il était imprescriptible, ce qui était vrai, il fallait désormais affirmer haut et fort que personne ou plus exactement aucun homme n'accepterait l'intolérable. Ce n'étaient plus des rêveries d'un promeneur solitaire,  pas plus qu'un conte philosophique mais un véritable credo. Tel était l'apport du dragon de fer, telle était la contribution de l'arménité à l'évolution de l'humanité.

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La relation avec la rivière
N. Lygeros
Traduit du Grec par A.-M. Bras

La relation avec la rivière 
a une grande importance 
parce que c’est l'eau de vie 
et cette combinaison 
avec le port et la mer
détermine la position 
toujours stratégique
pour la diachronie
de la civilisation 
qui veut résister 
à la barbarie 
et supporter 
les conditions défavorables
sans succomber 
parce qu'elle connaît 
sa valeur 
pour le Temps 
et l'Humanité.
http://www.lygeros.org/articles?n=14589&l=fr

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Cette année-là
N. Lygeros
Traduit du Grec par A.-M. Bras

Cette année-là
le blanc était très rude 
et rares étaient ceux 
en mesure de résister 
ainsi chaque jour 
mouraient en route 
ceux qui n'avaient pas été choisis 
et cela finissait toujours 
par leur mort 
dans la neige 
pour que ne soit pas entendu 
le cri de la voix 
qui n’avait pas réussi 
à vivre un instant 
en tant qu’être libre 
parce qu'il était né 
condamné 
par la barbarie.

http://www.lygeros.org/articles?n=14950&l=fr

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Toile de N. Lygeros

Sur l'Arménie, le pays de l'ocre rouge
N. Lygeros


S’il fallait choisir une couleur pour l’Arménie, ce serait certainement le rouge. S'il fallait choisir une texture pour l’Arménie, ce serait sûrement l'ocre. Certes tous les Arméniens connaissent le tuf, puisque cette pierre, c'est celle des croix, des khatchkars, néanmoins dans le monde de la peinture, nous devons faire des choix. Car le choix est une privation. Pour le saisir, il suffit de repenser quelques instants au film Ararat et en particulier au peintre et à sa difficulté à réaliser sur la toile les mains de sa pauvre mère. Ce choix correspond à l'existence d'une nécessité. Mais il représente aussi une analogie que nous retrouvons dans certains tableaux. L'Arménie n'est pas sans rappeler le désert et dans ce désert il est possible de trouver un monastère, comme celui de Sainte Catherine, ainsi que l’a mis en exergue le fameux El Greco. Aussi ce choix n’est pas arbitraire comme certains auraient pu le croire. Dans un tableau qui représente l'Arménie, le rouge est indispensable, l'orange est nécessaire et le bleu, inattendu, ou alors à peine esquissé comme pour créer un besoin essentiel. Après tout, l'Arménie a, elle aussi droit à un morceau de ciel. Il est vrai que le Mont Ararat montre le chemin à suivre même s'il n'existe pas pour le moment de route arménienne qui mène à ce symbole. Dans le paysage arménien, il est difficile de savoir quel est le détail auquel il faut donner de l'importance. Car tout semble pareil comme dans un tableau où les variations chromatiques et leur masse sont semblables. Il nous faut donc nous munir de patience et rechercher les traces. Cela peut être une fontaine,  un arbre, une pierre particulière ou même un arbre oublié dans le temps de la résistance et devenu ocre pour ressembler à sa patrie. Comme si les autres couleurs n'avaient plus de sens dans cet environnement. Cette couleur de la terre nous rappelle de manière symbolique que l'Arménie n'est que cela. Aussi cela n'a pas de sens de se la représenter comme un papier qui peut être brûlé dans une négociation absurde. Que deviendra l’ocre dans  une terre devenue désert des hommes. Aucun Vincent van Gogh n'aurait touché la toile dépourvue d'humanité. La terre d’Arménie n’est pas seulement un lieu de revendication comme certains pourraient le penser. Si nous demandons que justice soit faite, ce n’est pas en raison de notre amour pour le procès de Joseph Kafka car nous préférons le château. Ce n’est pas non plus un endroit où nous attendons Godot comme Samuel Beckett. Non, nous n’attendons rien des autres car nous avons déjà l’expérience du passé. Cependant nous ne recherchons pas seulement la vérité à travers la justice mais aussi la beauté des hommes nés dans l’ocre rouge. Ce que nous voulons affirmer haut et fort, c’est que la lutte pour les droits de l’homme et en particulier pour la cause arménienne n’est pas une fin en soi, ce n’est qu’un intermédiaire dans le cadre du processus de réparation qui consiste à restituer à un peuple la beauté non seulement de son passé mais aussi de son avenir.

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Sur le paysage turbulent
N. Lygeros

Qui s'interroge sur la nature du combat de l'arménité ? Qui ose transgresser le pouvoir de la barbarie ? Nous n'avons de cesse de parler des droits de l'homme alors que nous ne connaissons pas cet homme. Nous n'avons accès qu'à certains hommes. Et puis ces derniers sont tellement rares qu'il est difficile de se faire une idée précise de la signification de cette expression. L'article défini associé à un mot abstrait confère à l'expression un caractère universel. Et pourtant nous nous empressons de la caractériser comme vide de sens. L'arménité, par sa volonté et sa résistance nous fait découvrir le paysage turbulent des droits de l'homme. Ces derniers donnent l'impression qu'ils n'existent que lorsqu'ils sont bafoués à l'instar de la notion de génocide. Cependant en Arménie et surtout en Artsakh, cette abstraction est une réalité. Sans cette réalité, des milliers d'hommes et de femmes ne pourraient vivre dans ce paysage turbulent. Cependant cela semble ne préoccuper personne. Et pourtant, c'est bien la voie à suivre dans ce domaine profondément humain que la société ne peut décidément pas comprendre. Celle-ci ne désire que le calme du néant et le bonheur du vide sans se préoccuper nullement de la nécessité humaine, la dignité humaine et bien sûr l'avenir de l'humanité.

Comment être artificiel au milieu des pierres ? Comment ne pas aimer l'eau dans la chaleur du rouge ? Quant à la rudesse du blanc, seul le bleu du ciel peut quelque peu l'adoucir. Aussi les Arméniens sont comme face au néant. Alors que faire comme disait Лев Толстой ? Rien qui ne soit humain. Aussi seul l'indispensable a un sens. Mais quel serait ce sens sans la terre des pierres ? Dans le jardin noir où dominent les différents verts, la question ne se pose pas de la même façon. Quelques pierres suffisent aux hommes pour rappeler la présence des dragons dans cet univers nain en manque d'expansion. Dans le confinement humain que représente l'Artsakh, tout prend un sens nouveau. Car les mouvements n'évoluent que dans le silence d'un paysage qui n'a qu'en apparence perdu son caractère turbulent. Comme s’il se préparait à vivre à nouveau des nuits transfigurées dans lesquelles le dodécaphonisme aurait été aussi impatient qu'un enfant en quête d'un jouet, à moins que ce ne fut un tambour pour sonner le branle-bas d'un combat jamais oublié.


Alors en voyant tout cela, lorsque nous nous retrouvons face au mont Ararat, comment accepter qu'il soit au sein d'une barbarie qui refuse toute histoire, tout humanisme afin d'être à l'abri des hommes sur ses fondations où s'empilent un million et demi de génocidés. Leurs cris ne cessent de faire grincer l'histoire comme pour signifier que rien n'est fait encore et que tout reste à faire dans cette région du monde qui a connu le crime contre l'humanité. Nous ne pouvons pas nous contenter de symboles et encore moins de promesses de la part d'un état qui n'a jamais vraiment hésité à signer des traités qu'il n'a pas respectés par la suite. Aussi cessons d'appliquer de notre coté mais surtout de manière unilatérale des traités qui ne sont pas faits pour obtenir la paix mais pour préparer de manière plus systématique les sanctions susceptibles d’être exploitées dans le cadre de la loi islamique qui malgré ses emprunts manifestes au droit romain demeure malgré tout très passive. Les traités maltraitent et les maltraités traitent, tel est le paradoxe non pas de la nature humaine mais de la massification des états racistes.

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Sur l'étrange paysage
N. Lygeros


En Artsakh, l’impensable est une réalité. Pour en prendre conscience, il suffit de contempler l’étrange paysage. Ce dernier ne se trouve pas à Stepanakert mais dans la région d’Agdam. Et sans nos amis, les combattants d’Artsakh, nous ne l’aurions jamais découvert. Il est difficile d’imaginer cette réalité interdite. Ce n’est pas tant son accès qui pose problème que la volonté absurde de ne rien faire et surtout de ne rien revendiquer. Le paysage est étrange aussi par l’absence  de présence humaine. Il provoque un sentiment d’attente plutôt que de lassitude. Comme si tout le monde attendait qu’il se passe quelque chose même si en apparence il ne se passe rien. La nature continue à vivre sa vie sans les hommes. Les uns ne sont plus là par crainte des autres, les autres ne sont pas là par crainte des leurs. Et puis nous avons bien sûr les diplomates qui ne connaissent que des cartes et qui ne cessent de parler de restitution sans se rendre compte, ou plutôt, qui ne veulent l’avouer, que cela serait fatal pour la capitale arménienne. Les champs de mines ne sont impressionnants que par les vieux panneaux d’indication. Les champs de blé continuent à être une source de revenus, sans que cela ne suffise à changer les choses. La route est toujours caillouteuse et en mauvais état comme l’histoire des pays de l’ocre rouge et des cyprès bleus. Qui oserait le mentionner puisque la zone demeure interdite ? Néanmoins, malgré l’interdiction sociale, les grenadiers continuent à attendre les hommes. Ces derniers se font rares certes, mais ils n’oublient pas la terre de leurs ancêtres. Voilà pourquoi nous sommes retournés à la source qui avant, était si précieuse durant la guerre. Elle était au-delà de Trigranakert comme pour signifier que la réalité avait dépassé le symbole, que l’avenir avait transcendé le passé pour créer un nouveau présent, incompréhensible pour la plupart, paradoxal pour certains, révélateur pour les hommes. Elle coulait toujours, et elle était tendre comme autrefois d’après le témoignage de nos  amis. Elle continuait à arroser les grenadiers aussi nous ne pouvions pas ne pas emporter une grenade avec nous pour l’offrir à la liberté de nos pensées. À cet endroit, il était plus facile de réaliser le véritable sens de l’arménité. Pourtant nous étions au milieu de nulle part, seuls. Malgré cela ou plutôt grâce à l’absence de la foule, nous pouvions voir avec discernement l’essentiel de notre histoire, même si certains voulaient la transformer en mythologie. L’essence était là, près de cette source, sous les grenadiers, dans la zone interdite des territoires libérés. Aucune diplomatie ne pouvait saisir le sentiment de joie que nous éprouvions. Car aucune diplomatie n’avait livré de combat véritable pour l’arménité. Il ne s’agissait plus de symbole mais de l’essence même de notre nature. Conscients de l’interdiction d’interdire, survivants du génocide de la mémoire, nous étions à cet endroit malgré tout et malgré tous. Nous étions venus pour nous ressourcer pour mieux lutter contre la barbarie et l’oubli. Notre mission n’était pas achevée, elle venait de prendre un nouveau sens et nous étions prêts à nous sacrifier pour celui-ci.

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Les Balkans du Caucase
N. Lygeros


En examinant la carte du Caucase, il est difficile de ne pas penser au contexte des Balkans. En effet, écrasés par la pression de trois grands pays, à savoir la Russie, l’Iran et la Turquie, trois petits pays, l’Arménie, l’Azerbaïdjan et la Géorgie, constituent une région extrêmement instable. Cette instabilité est d’une part externe – ce sont les revendications territoriales effectives – et d’autre part interne – ce sont les revendications et la guerre du Haut-Karabagh. Nous avons donc une double instabilité qui provient directement de la confrontation de l’Empire ottoman et de la Russie puis de l’Union Soviétique. Il faut de plus dans ce contexte explosif rajouter la question kurde qui crée une autre interférence à l’interface Turquie Iran. Enfin, il est nécessaire de tenir compte de contacts avec l’Union Européenne puisque la Turquie est candidate et les trois petits pays Arménie, Azerbaïdjan et Géorgie sont dans la première phase de relation. En tenant compte de l’ensemble de ces conditions géostratégiques et dispositions géopolitiques, le fait de considérer l’Arménie comme un état stable relève soit de l’ignorance soit de l’inconscience. Cette configuration est le résultat de la non application du Traité de Sèvres et de l’application multiple et sélective des Traités de Moscou, de Kars, de Lausanne et d’Ankara. Sans vouloir remettre au goût du jour la célèbre phrase de Clémenceau sur les Traités et les Accords, il est néanmoins difficile de ne pas constater l’existence de tensions qui ne sont pas seulement de surface. En réalité, nous avons localement les conséquences de véritables mouvements de tectonique des plaques dans le domaine géostratégique. Il n’est donc pas prudent ni même intelligent d’attendre de l’Arménie avec ses frontières et sa surface actuelles de prendre des initiatives vis-à-vis de la candidature orientale mais de la problématique de la reconnaissance du génocide des Arméniens. La situation ne permet pas de justifier des choix politiques mais permet certainement de les comprendre. Par contre, elle met en évidence l’intérêt de remettre en place des partis arméniens en exil, dans le centre de l’Arménie. Car en l’absence de stabilité frontalière, la gestion et la tactique de modifications de ces dernières n’est pas une utopie politique. Le point est simple : il ne suffit pas de réclamer, il faut revendiquer. Et il ne suffit pas d’intenter un procès, il faut le gagner. Seulement il faut être conscient et réaliser que cela est possible. La problématique de l’Arménie Occidentale n’est pas une utopie pour l’Arménie Orientale. Au contraire, elle représente un moyen stratégique pour l’objectif de la stabilité territoriale car il est indispensable d’avoir des frontières naturelles au sens géographique du terme afin de reconfigurer les pourcentages de population, de manière à ce qu’ils soient compatibles. Car le vrai problème, c’est que les frontières de la Turquie sont totalement artificielles dans la région du Caucase et pas seulement. Car en Cilicie, de nombreux villages, arméniens en 1915, sont actuellement déserts ou faiblement habités et encore pas nécessairement par des populations turques. Aussi il faut bien réaliser que la reconnaissance du génocide des Arméniens n’est qu’une étape dans les Balkans du Caucase.

http://www.lygeros.org/2188-fr.php

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N. Lygeros - La pensée de Dostoïevski à travers son oeuvre. MGEN Lyon, 28/03/2014. 
Partie A
Partie B
Partie C

N. Lygeros - La pensée de Dostoïevski à travers son oeuvre. MGEN Lyon, 28/03/2014. 
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  Photo Isabelle-Achrenka Yvos

Le soleil de Savoie
N. Lygeros

Le soleil de Savoie
ne se cache pas
sur la place du marché
sous le toit pentu
mais illumine les arbres
désormais en fleur
grâce à ton regard
toujours émerveillé
face à la puissance
du printemps recommencé
qui n'hésite jamais
à vaincre l'hiver
toujours trop blanc
pour imposer la couleur
de la nature qui revient
pour reprendre le dessus
sur la rudeur
afin de donner
aux hommes libres
le pouvoir de vivre

à nouveau de la lumière.

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L'aventure de la lumière
N. Lygeros

L'aventure de la lumière
commence au bord
d'un échiquier en bois
sous la musique
d'une époque révolue
mais toujours vivante
dans notre esprit
car elle a touché
de plein fouet notre coeur
au moment où nous vivons
sans avoir conscience
du cadeau de la vie
offert dans un amphithéâtre
d'un soleil bleu
mais se poursuit
à travers les décennies
pour maîtriser l'art
de la contemplation
et comprendre
l'essentiel de la vie

toujours partagée.

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Le vert tendre des arbres
N. Lygeros

Le vert tendre des arbres
nous rappelle sans cesse
que ce que nous croyons
être définitivement mort
n'est en réalité qu'un retour
dans une continuité
de l'évolution temporelle
de la polycyclicité
où chaque geste
n'est qu'un acte de plus
dans une pièce
qui se veut être
l'essence d'une vie
nécessairement multiple
pour accomplir
l'exploit humain
de supporter
les souffrances
pour l'ensemble des hommes
qui font leurs prières

sous la croix.

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La nature de la résistance
N. Lygeros

La nature de la résistance
est bien moins complexe
qu'elle ne semble
si tu tiens compte du sacrifice
de la dignité humaine
aussi attarde-toi
sur cette notion première
pour comprendre réellement
l'essence fondamentale
qui gouverne nos vies
car elle naît de la mort
et de la mémoire
qui est nécessaire
pour le transcender
afin de changer
l'hyperstructure
de l'ouverture temporelle
qui se ramifie
pour exploiter

toutes les dimensions.

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Dans le tunnel temporel
N. Lygeros

Dans le tunnel temporel
nous extrapolons notre vie
pour atteindre des contrées
encore inconnues
tels des explorateurs
qui vivent de la nouveauté
dans le regard de la nature
sans jamais oublier
leur entité humaine
pour donner une étincelle
à l'obscurité des astres
qui ne cessent de briller
malgré le néant apparent

afin de montrer la voie.

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Monologue Humain I
N. Lygeros

Traduit du Grec par A.-M. Bras

- Pourquoi la victime est-elle morte. Y avait-il une raison quelconque ou était-ce absurde. Il a juste touché le ballon qu’il est tombé à genoux. On n’a rien entendu. Et puis il s'est effondré mort. Enfin je pense. Je ne suis pas sûre, j'ai peut-être fait une erreur. Le soleil était si fort. Je ne pouvais rien entendre. Sauf les mouches. Innombrables mouches. Comme si elles avaient su à l'avance pour le mort. Ou peut-être pas. J’ai marché en tout cas et j'ai laissé l'homme sans ombre là-bas où il était tombé. Peut-être pas?
http://www.lygeros.org/articles?n=14791&l=fr


Monologue Humain II
N. Lygeros

Traduit du Grec par A.-M. Bras

- Tu dis que c’était un mensonge ? Mais cela semblait si vrai? Je n'ai rien trouvé quand je suis retourné au même endroit. Pas même une goutte de sang. J'étais sûre ... C'est ce que je pensais plutôt ... Pourquoi revenir, je n'ai rien fait alors, qu'est-ce que je vais faire maintenant? Tentation humaine ... Je voulais confirmer que je n'étais pas coupable. Mais maintenant qu'il n'y a même pas eu un crime, comment y aurait-il un coupable? La tête me tourne. Quelque chose se passe, ce n’est pas possible. Puisqu’il était ici! N’était-il pas ici? Peut-être pas. Les mouches sont parties. Pourquoi? Et le soleil, toujours brûlant.
http://www.lygeros.org/articles?n=14792&l=fr


Monologue Humain III
N. Lygeros

Traduit du Grec par A.-M. Bras

Maintenant, je me souvenais du lait et des dattes. Oui, oui, je l'ai lu. Il était au professeur qu’ils ont tué parce qu'ils croyaient. Que croyaient-ils? Ils étaient tous sûrs. Et pour cela ils l'ont condamné à mort. Mais quel rapport y a-t-il. C'est peut-être la même personne? Il est peut-être effectivement allé avec lui? Mais il y des années de différence. Et les faits ne mentent pas. Ce n’est pas ainsi. Qui va me croire? ... Personne, même moi je ne me crois pas moi-même. Qu'est-il arrivé alors? C’était un étourdissement. Ou me suis-je souvenu de quelque chose. Le livre ... Avec cette étrange couverture. Non, ça ne se fait pas ... Et l'homme à la pierre?


Monologue Humain IV
N. Lygeros

Traduit du Grec par A.-M. Bras

- Et si c'était le même cas. Ils ont entendu plus étrange ... c’est possible ou pas? Il n'y a pas d'autre choix. Il était étranger? Oui sûrement autrement je m’en souviendrais. Je me souviens pourtant de quelque chose ... C’est peut-être dans l'anonymat ... Attendez, quelle heure était-il? Midi? ... Le soleil…non il est toujours là. Il ne veut rien dire. Pourquoi n’a-t-il rien dit. Et l'autre? Celui qui courait? Celui-là a lancé la balle ou il a eu peur? Il est parti plus vite que moi. Il savait quelque chose. Et puis quelqu’un ... Est-ce possible? Oui, c’est possible. J'étais seule. Oui, toute seule. Mais où aller dans la chaleur?
http://www.lygeros.org/articles?n=14794&l=fr



Monologue Humain V
N. Lygeros

Traduit du Grec par A.-M. Bras

- Une ombre s'il vous plaît. Ils vont penser que je suis idiot. Qu'importe? Une ombre s'il vous plaît. Personne ne répond. Mais où sont-ils allés? Toute la ville s’est vidée. Et les bâtiments ... Oui, les bâtiments ... et qui les a frappés ... Des bombes ? Je ne sais pas…Possible ... Une ombre s'il vous plaît ... Que s'est-il passé ici, que se passe-t-il ici. Peut-être est-ce ... ça ne se peut pas ... je l’aurais appris ... Mais comment rien ne fonctionne plus ... Personne ne répond ... Et le soleil toujours au-dessus de notre tête ... Nous sommes des hommes sans ombres. Ça ne va pas ... Je continue ...Je marche ... La guerre est donc arrivée. La guerre sans nom.

http://www.lygeros.org/articles?n=14795&l=fr

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C'était en 2009 à Alexandroupolis


http://dzovinar.blogspot.fr/2014/04/le-monde-de-vincent-alexandroupolis.html

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Les  hommes sans ombres
N. Lygeros

Traduit du Grec par A.-M. Bras

Les hommes sans ombres 
étaient tous des victimes 
morts sur la terre 
et autant qu’il essayait 
le soleil le grand
ne pouvait rien 
pour tous ceux qui tombaient 
qui n’avaient aucune ombre 
au dessous de leur corps 
parce que leur corps 
était mort en-dessous 
combien de temps veux tu 
pour comprendre 
ce qui s'est passé alors 
pour que tu saches simplement
qu’ainsi commença la guerre

la guerre sans nom.

http://www.lygeros.org/articles?n=14796&l=fr

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Conférence par Nikos Lygeros
Lemkin et le paradigme du génocide des Arméniens. 
18 avril 2014, 68 avenue Marcel Cerdan, 69100, Villeurbanne



(Vidéos de la conférence)


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Le Temps Créateur

N. Lygeros
Traduit du Grec par Patrice Deloche

Le Temps Créateur
est un Maître
de l'Humanité
qui apprend 
grâce aux Caméléons 
parce que leurs sacrifices
créent des piliers
pour la continuité
et l'évolution
de la perfection
en surmontant les obstacles
des sociétés
pour ne pas perdre
l'essence de la connaissance
dans cette course de relais.

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La bibliothèque

N. Lygeros
Traduit du Grec par A.-M. Bras

La Bibliothèque
est l'espace
de l’Humanité
et si tu n’y as pas 
accès
tu ne peux 
apprendre
le passé
et vivre
l’avenir
libre
donc apprends
à lire
les morts
qui ont écrit
pour ceux qui n’étaient pas nés.

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Combien de fois

N. Lygeros
Traduit du Grec par A.-M. Bras

Combien de fois
faisons nous
des choses
pour l'autre
alors qu’en réalité
c’est pour nous
puisque nous n’avons pas réussi
à ressentir
ce qui devrait être fait
ce que voulait l'autre
et nous avons fait
une projection
de notre envie
comme si c’était
un souhait
qui était entendu
bien qu'il n’y ait
que silence.

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L'injustice de la société

N. Lygeros
Traduit du Grec par A.-M. Bras

L'injustice de la société
en Mathématiques
est qu’elle pose sans cesse la question 
de leur utilité
tandis qu’elle est celle
qui est nulle
qui l’évalue
alors qu’elle n’a
aucun critère
pour repérer
leur essence
puisqu’elle ne veut pas
rester
diachronique
simplement pour exploiter
l’actuel.

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Ce qui est utile

N. Lygeros
Traduit du Grec par A.-M. Bras

Ce qui est utile
pour la société
est inutile
pour l'Humanité
pour cette raison,
ne perds pas de temps
pour la convaincre 
car c’est inutile
en raison de l'indifférence
et de l'oubli
mais continue
avec nous
la recherche
qui préoccupe
l’Humanité.

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Pour la lumière

N. Lygeros
Traduit du Grec par A.-M. Bras

Pour la lumière
l'autre
ne nous est pas venu
en même temps
mais du passé
et nous renversons
la souveraineté
de l’ego
pour réveiller
non pas l'unicité
avec la substance
de la continuité
à cause de la nécessité
pour toucher
aussi les suivants
avant qu’ils le demandent.

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Si Constantinople

N. Lygeros
Traduit du Grec par A.-M. Bras

Si Constantinople
était notre base
alors la Renaissance
serait le géniteur
de prochains
mouvements d'induction
qui ont créé
l’Humanisme
et les Lumières
c’est pour cela que
ce point a
tant d’importance
pour les relations
de toute l'Europe.



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