MONSIEUR L'AMBASSADEUR
Ambassade de Suisse à Paris
142, Rue de Grenelle
75007 PARIS
URGENT
Télécopie au 01 49 55 67 67
+ LRAR n°1A 089 799 9082 7
AFF. Grégoire et Suzanne KRIKORIAN et a. c/ ETAT ( demande contentieuse de transposition de la décision-cadre 2008/913/JAI du Conseil du 28 Novembre 2008 sur la lutte contre certaines formes et manifestations de racisme et de xénophobie au moyen du droit pénal ( VOIE DE FAIT )
OBJET: DEMANDE DE TIERCE INTERVENTION/
renvoi de l'affaire PERINCEK c. SUISSE ( n°27510/08 ) devant la Grande Chambre ( articles 36 § 2 de la Convention européenne des droits de l'homme et 44 § 3 du Règlement de la Cour européenne des droits de l'homme )
Marseille, le 17 Juin 2014
Monsieur l'Ambassadeur,
J'ai l'honneur, dans l'exercice de ma mission constitutionnelle de défense des intérêts de Monsieur et Madame Grégoire KRIKORIAN et des huit autres requérants, de faire suite à ma lettre du 30 Décembre 2013, relative à l'affaire sous références.
Mes mandants et moi-même avons noté avec satisfaction que le collège de cinq juges a fait droit, le 02 Juin 2014 écoulé, à la demande du Gouvernement suisse tendant au renvoi de l'affaire PERINCEK c. SUISSE ( n°27510/08 ) devant la Grande Chambre de la Cour européenne des droits de l'homme.
Il s'agit d'un premier succès pour la Suisse qui mérite d'être dignement salué.
Il m'est apparu indiqué, à cet égard, que les autorités fédérales de Berne soient informées :
- D'une part, de la saisine, par mes soins, au nom et pour le compte des requérants, de la Cour de justice de l'Union européenne, d'une demande de décision préjudicielle ( aff. C-243/14 – pièce n°1 ) tendant à :
1°) l'invalidation de l'article 1er § 4 de la décision-cadre 2008/913/JAI du Conseil du 28 Novembre 2008 sur la lutte contre certaines formes et manifestations de racisme et de xénophobie au moyen du droit pénal ( JOUE 06 Décembre 2008, L. 328/55 ) ;
2°) l'interprétation du droit de l'Union européenne, et développée de la façon suivante :
« 2°) DIRE POUR DROIT :
2-a°) L'article 1er, paragraphe 4 de la décision-cadre 2008/913/JAI du Conseil du 28 Novembre 2008 sur la lutte contre certaines formes et manifestations de racisme et de xénophobie au moyen du droit pénal est invalide ;
2-b°) La décision-cadre 2008/913/JAI du Conseil du 28 Novembre 2008, sur la lutte contre certaines formes et manifestations de racisme et de xénophobie au moyen du droit pénal, les articles 4 § 3 et 19 § 1, alinéa 2 TUE, les articles 3, 6 § 1, 8 et 13 de la Convention européenne des droits de l'homme, les articles 1er, 2, 3, 4, 5, 7, 20, 21 et 47 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne doivent être interprétés en ce sens qu'ils s'opposent à une législation nationale, telle que la Constitution française et plus spécialement l'article 6 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen du 26 Août 1789 interprété par le Conseil constitutionnel comme faisant obligation à la loi d'être normative et comme retirant cette qualité à une loi ayant pour objet de reconnaître un crime de génocide ( « qu'une disposition législative ayant pour objet de 'reconnaître' un crime de génocide ne saurait, en elle-même, être revêtue de la portée normative qui s'attache à la loi; » ), pour autant que cette pratique jurisprudentielle nationale a pour conséquence d'empêcher la transposition adéquate en droit interne de la décision-cadre susvisée, en excluant le Génocide Arménien de son champ d'application qui n'est pourtant pas défini en extension ( dénotation ), mais seulement en compréhension ( connotation );
2-c°) Le droit à un juge impartial qui procède du droit à un procès équitable garanti notamment par l'article 6 § 1 CEDH et l'article 47 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, doit être interprété en ce sens qu'il s'oppose à une pratique jurisprudentielle telle celle du Conseil constitutionnel français consistant à publier sur son site internet officiel, avant de rendre sa décision, une prise de position sur la normativité des lois de reconnaissance des génocides, à l'instar de la loi n°2001-70 du 29 Janvier 2001 relative à la reconnaissance du Génocide Arménien de 1915, intitulée 'ABSENCE DE NORMATIVITE OU NORMATIVITE INCERTAINE DES DISPOSITIONS LEGISLATIVES';
2-d°) Les articles 4 § 3 et 19 § 1, alinéa 2 TUE, les articles 6 § 1 et 13 de la Convention européenne des droits de l'homme, l'article 47 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne doivent être interprétés en ce sens qu'ils s'opposent à une pratique jurisprudentielle, telle que la théorie des actes de gouvernement, aujourd'hui cristallisée par l'article 26 de la loi du 24 Mai 1872 sur l'organisation du Conseil d'Etat, sur le fondement de laquelle certains actes de l'exécutif national sont exclus du contrôle juridictionnel, au motif qu'ils touchent aux relations avec le Parlement ou à la conduite des relations diplomatiques de l'Etat, alors même que de tels actes sont susceptibles de violer les droits fondamentaux, notamment le droit à une protection juridictionnelle effective; ».
- D'autre part, de la demande de tierce intervention ( pièce n°2 ) que j'ai adressée, le 16 Juin 2014 écoulé, dans la défense des intérêts de mes mandants, à Monsieur le Président de la Cour européenne des droits de l'homme, en application des articles 36 § 2 de la Convention européenne des droits de l'homme et 44 § 3 du Règlement de la Cour européenne des droits de l'homme, aux fins d'observations écrites à la Grande Chambre.
Dans cette perspective, eu égard au caractère exceptionnel de la problématique du Génocide Arménien relevant du JUS COGENS et d'un intérêt supérieur de civilisation, les règles du procès équitable, comme les impératifs d'une bonne administration de la justice, commandent que la Grande Chambre, faisant application de l'article A1 – Mesures d'instruction - Annexe au Règlement de la CEDH du 1er Juillet 2013, aux termes duquel :
« ( … )
2. La chambre peut aussi inviter toute personne ou institution de son choix à exprimer un avis ou à lui faire un rapport écrit sur toute question que la chambre juge pertinente pour l'affaire. ( … ) »,
décide de surseoir à statuer et adresse à la Cour de justice de l'Union européenne ( CJUE ) une demande d'avis ou de rapport écrit, pouvant être qualifiée de demande de décision préjudicielle, en complément de celle dont la Haute juridiction européenne est d'ores et déjà saisie, comme susdit, par Monsieur et Madame Grégoire KRIKORIAN et autres requérants ( affaire n° C-243/14 ).
La question à poser par la Grande Chambre à la Cour de Luxembourg pourrait, dès lors, être libellée comme suit :
« Le Génocide Arménien, crime contre l'humanité notoire commis par l'Empire ottoman pendant la première guerre mondiale, au préjudice des populations civiles arméniennes, constituant la Nation arménienne, reconnu par de nombreux instruments nationaux et internationaux, notamment la résolution du Parlement européen du 18 Juin 1987 « sur une solution politique de la question arménienne » ( n°C 190/119 ) et la loi française n°2001-70 du 29 Janvier 2001 « relative à la reconnaissance du génocide arménien de 1915 » ( JORF 30 Janvier 2001, p. 1590 ), peut-il être exclu de l'incrimination du négationnisme ou, à l'inverse, doit-il être implicitement, mais nécessairement considéré comme compris dans le champ d'application de la DECISION-CADRE 2008/913/JAI DU CONSEIL du 28 Novembre 2008 sur la lutte contre certaines formes et manifestations de racisme et de xénophobie au moyen du droit pénal dont l'article 1er, § 1, sous c) procède par compréhension ( connotation ) et renvoie, pour la définition des crimes de génocides, crimes contre l'humanité et crimes de guerre dont l'apologie, la négation ou la banalisation grossière publiques, dès lors qu'elles s'accompagnent d'un risque d'incitation à la violence ou à la haine, doivent être rendues punissables par chacun des Etats membres de l'Union européenne, au plus tard le 28 Novembre 2010, 'aux articles 6, 7 et 8 du Statut de la Cour pénale internationale', convention qui oblige la Suisse ( signature du 18 Juillet 1998 et ratification du 12 Octobre 2001 avec déclaration au titre de l'article 103 § 1 du Statut ) et dont l'article 69 § 6 rappelle que 'La Cour n'exige pas la preuve des faits qui sont notoires, mais en dresse le constat judiciaire' ?
Il importe, en effet, de mesurer, dans la perspective de la solution à trouver au litige pendant devant la Grande Chambre, eu égard spécialement à la déclaration de la Suisse lors de la ratification en date du 12 Octobre 2001 du Statut de Rome, aux termes de laquelle « Conformément à l'art. 103, par. 1 du Statut, la Suisse déclare être prête à prendre en charge l'exécution des peines privatives de liberté infligées par la Cour à des ressortissants suisses ou à des personnes ayant leur résidence habituelle en Suisse. », l'hypothétique influence de l'entrée en vigueur du Statut de Rome ( 1er Juillet 2002 ) sur la pénalisation du négationnisme.
Rien ne justifierait, à cet égard, que la Suisse puisse sanctionner le négationnisme d'un crime contre l'humanité établi par la Cour pénale internationale après le 1er Juillet 2002, date d'entrée en vigueur du Statut de Rome et soit empêchée de le faire pour un génocide, comme le Génocide Arménien, au seul motif qu'il a été perpétré antérieurement, bien que de tels crimes soient par nature imprescriptibles et que la décision-cadre ne renvoie pas à l'article 11 dudit Statut de Rome ( Compétence ratione temporis ).
Or, seule la Cour de justice de l'Union européenne est habilitée à apporter une réponse décisive à cette question cruciale nécessitant une interprétation authentique et faisant foi notamment de l'article 1er, § 1, sous c) de la décision-cadre du 28 Novembre 2008. Une telle solution opposable aux Etats membres de l'Union européenne serait applicable à la Suisse, membre de l'Association européenne de libre-échange ( A.E.L.E. ).
Il est patent, en tout état de cause, que les réponses de la Cour de Luxembourg aux questions préjudicielles susvisées seront déterminantes tant dans la transposition adéquate par chacun des vingt-huit Etats membres de l'Union européenne de la décision-cadre du 28 Novembre 2008 susmentionnée, que dans l'appréciation par la Grande Chambre de l'application par les juridictions suisses – notamment le Tribunal fédéral dans son arrêt du 12 Décembre 2007 – de l'article 261 bis du Code pénal suisse, qui ne laisse apparaître aucune violation de la Convention européenne des droits de l'homme ou de l'un de ses protocoles dont Dogu PERINCEK – compte tenu de son comportement constitutif d'un abus de droit manifeste prohibé par l'article 17 de la Convention - pourrait raisonnablement faire grief à la Suisse.
J'apprécierais, dès lors, que cette demande de décision préjudicielle trouve un écho favorable auprès du Gouvernement suisse.
Vous souhaitant bonne réception de la présente,
Je vous prie de croire, Monsieur l'Ambassadeur, en l'assurance de ma haute considération.
Philippe KRIKORIAN
PIECES
Accusé de réception du Greffe de la Cour de justice de l'Union européenne du 28 Mai 2014 attestant de l'enregistrement sous le n° C-243/14 de la « demande de décision préjudicielle » du 13 Mai 2014 ( deux cent dix pages ) - « Date de la décision de renvoi : 13/05/2014 » – « Date de dépôt au greffe de la Cour : 13/05/2014 »
Demande de tierce intervention en date du 16 Juin 2014 de Maître Philippe KRIKORIAN à Monsieur le Président de la Cour européenne des droits de l'homme ( soixante-sept pages ) ( renvoi de l'affaire PERINCEK c. SUISSE - n°27510/08 - devant la Grande Chambre - articles 36 § 2 de la Convention européenne des droits de l'homme et 44 § 3 du Règlement de la Cour européenne des droits de l'homme ).
Ambassade de Suisse à Paris
142, Rue de Grenelle
75007 PARIS
URGENT
Télécopie au 01 49 55 67 67
+ LRAR n°1A 089 799 9082 7
AFF. Grégoire et Suzanne KRIKORIAN et a. c/ ETAT ( demande contentieuse de transposition de la décision-cadre 2008/913/JAI du Conseil du 28 Novembre 2008 sur la lutte contre certaines formes et manifestations de racisme et de xénophobie au moyen du droit pénal ( VOIE DE FAIT )
OBJET: DEMANDE DE TIERCE INTERVENTION/
renvoi de l'affaire PERINCEK c. SUISSE ( n°27510/08 ) devant la Grande Chambre ( articles 36 § 2 de la Convention européenne des droits de l'homme et 44 § 3 du Règlement de la Cour européenne des droits de l'homme )
Marseille, le 17 Juin 2014
Monsieur l'Ambassadeur,
J'ai l'honneur, dans l'exercice de ma mission constitutionnelle de défense des intérêts de Monsieur et Madame Grégoire KRIKORIAN et des huit autres requérants, de faire suite à ma lettre du 30 Décembre 2013, relative à l'affaire sous références.
Mes mandants et moi-même avons noté avec satisfaction que le collège de cinq juges a fait droit, le 02 Juin 2014 écoulé, à la demande du Gouvernement suisse tendant au renvoi de l'affaire PERINCEK c. SUISSE ( n°27510/08 ) devant la Grande Chambre de la Cour européenne des droits de l'homme.
Il s'agit d'un premier succès pour la Suisse qui mérite d'être dignement salué.
Il m'est apparu indiqué, à cet égard, que les autorités fédérales de Berne soient informées :
- D'une part, de la saisine, par mes soins, au nom et pour le compte des requérants, de la Cour de justice de l'Union européenne, d'une demande de décision préjudicielle ( aff. C-243/14 – pièce n°1 ) tendant à :
1°) l'invalidation de l'article 1er § 4 de la décision-cadre 2008/913/JAI du Conseil du 28 Novembre 2008 sur la lutte contre certaines formes et manifestations de racisme et de xénophobie au moyen du droit pénal ( JOUE 06 Décembre 2008, L. 328/55 ) ;
2°) l'interprétation du droit de l'Union européenne, et développée de la façon suivante :
« 2°) DIRE POUR DROIT :
2-a°) L'article 1er, paragraphe 4 de la décision-cadre 2008/913/JAI du Conseil du 28 Novembre 2008 sur la lutte contre certaines formes et manifestations de racisme et de xénophobie au moyen du droit pénal est invalide ;
2-b°) La décision-cadre 2008/913/JAI du Conseil du 28 Novembre 2008, sur la lutte contre certaines formes et manifestations de racisme et de xénophobie au moyen du droit pénal, les articles 4 § 3 et 19 § 1, alinéa 2 TUE, les articles 3, 6 § 1, 8 et 13 de la Convention européenne des droits de l'homme, les articles 1er, 2, 3, 4, 5, 7, 20, 21 et 47 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne doivent être interprétés en ce sens qu'ils s'opposent à une législation nationale, telle que la Constitution française et plus spécialement l'article 6 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen du 26 Août 1789 interprété par le Conseil constitutionnel comme faisant obligation à la loi d'être normative et comme retirant cette qualité à une loi ayant pour objet de reconnaître un crime de génocide ( « qu'une disposition législative ayant pour objet de 'reconnaître' un crime de génocide ne saurait, en elle-même, être revêtue de la portée normative qui s'attache à la loi; » ), pour autant que cette pratique jurisprudentielle nationale a pour conséquence d'empêcher la transposition adéquate en droit interne de la décision-cadre susvisée, en excluant le Génocide Arménien de son champ d'application qui n'est pourtant pas défini en extension ( dénotation ), mais seulement en compréhension ( connotation );
2-c°) Le droit à un juge impartial qui procède du droit à un procès équitable garanti notamment par l'article 6 § 1 CEDH et l'article 47 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, doit être interprété en ce sens qu'il s'oppose à une pratique jurisprudentielle telle celle du Conseil constitutionnel français consistant à publier sur son site internet officiel, avant de rendre sa décision, une prise de position sur la normativité des lois de reconnaissance des génocides, à l'instar de la loi n°2001-70 du 29 Janvier 2001 relative à la reconnaissance du Génocide Arménien de 1915, intitulée 'ABSENCE DE NORMATIVITE OU NORMATIVITE INCERTAINE DES DISPOSITIONS LEGISLATIVES';
2-d°) Les articles 4 § 3 et 19 § 1, alinéa 2 TUE, les articles 6 § 1 et 13 de la Convention européenne des droits de l'homme, l'article 47 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne doivent être interprétés en ce sens qu'ils s'opposent à une pratique jurisprudentielle, telle que la théorie des actes de gouvernement, aujourd'hui cristallisée par l'article 26 de la loi du 24 Mai 1872 sur l'organisation du Conseil d'Etat, sur le fondement de laquelle certains actes de l'exécutif national sont exclus du contrôle juridictionnel, au motif qu'ils touchent aux relations avec le Parlement ou à la conduite des relations diplomatiques de l'Etat, alors même que de tels actes sont susceptibles de violer les droits fondamentaux, notamment le droit à une protection juridictionnelle effective; ».
- D'autre part, de la demande de tierce intervention ( pièce n°2 ) que j'ai adressée, le 16 Juin 2014 écoulé, dans la défense des intérêts de mes mandants, à Monsieur le Président de la Cour européenne des droits de l'homme, en application des articles 36 § 2 de la Convention européenne des droits de l'homme et 44 § 3 du Règlement de la Cour européenne des droits de l'homme, aux fins d'observations écrites à la Grande Chambre.
Dans cette perspective, eu égard au caractère exceptionnel de la problématique du Génocide Arménien relevant du JUS COGENS et d'un intérêt supérieur de civilisation, les règles du procès équitable, comme les impératifs d'une bonne administration de la justice, commandent que la Grande Chambre, faisant application de l'article A1 – Mesures d'instruction - Annexe au Règlement de la CEDH du 1er Juillet 2013, aux termes duquel :
« ( … )
2. La chambre peut aussi inviter toute personne ou institution de son choix à exprimer un avis ou à lui faire un rapport écrit sur toute question que la chambre juge pertinente pour l'affaire. ( … ) »,
décide de surseoir à statuer et adresse à la Cour de justice de l'Union européenne ( CJUE ) une demande d'avis ou de rapport écrit, pouvant être qualifiée de demande de décision préjudicielle, en complément de celle dont la Haute juridiction européenne est d'ores et déjà saisie, comme susdit, par Monsieur et Madame Grégoire KRIKORIAN et autres requérants ( affaire n° C-243/14 ).
La question à poser par la Grande Chambre à la Cour de Luxembourg pourrait, dès lors, être libellée comme suit :
« Le Génocide Arménien, crime contre l'humanité notoire commis par l'Empire ottoman pendant la première guerre mondiale, au préjudice des populations civiles arméniennes, constituant la Nation arménienne, reconnu par de nombreux instruments nationaux et internationaux, notamment la résolution du Parlement européen du 18 Juin 1987 « sur une solution politique de la question arménienne » ( n°C 190/119 ) et la loi française n°2001-70 du 29 Janvier 2001 « relative à la reconnaissance du génocide arménien de 1915 » ( JORF 30 Janvier 2001, p. 1590 ), peut-il être exclu de l'incrimination du négationnisme ou, à l'inverse, doit-il être implicitement, mais nécessairement considéré comme compris dans le champ d'application de la DECISION-CADRE 2008/913/JAI DU CONSEIL du 28 Novembre 2008 sur la lutte contre certaines formes et manifestations de racisme et de xénophobie au moyen du droit pénal dont l'article 1er, § 1, sous c) procède par compréhension ( connotation ) et renvoie, pour la définition des crimes de génocides, crimes contre l'humanité et crimes de guerre dont l'apologie, la négation ou la banalisation grossière publiques, dès lors qu'elles s'accompagnent d'un risque d'incitation à la violence ou à la haine, doivent être rendues punissables par chacun des Etats membres de l'Union européenne, au plus tard le 28 Novembre 2010, 'aux articles 6, 7 et 8 du Statut de la Cour pénale internationale', convention qui oblige la Suisse ( signature du 18 Juillet 1998 et ratification du 12 Octobre 2001 avec déclaration au titre de l'article 103 § 1 du Statut ) et dont l'article 69 § 6 rappelle que 'La Cour n'exige pas la preuve des faits qui sont notoires, mais en dresse le constat judiciaire' ?
Il importe, en effet, de mesurer, dans la perspective de la solution à trouver au litige pendant devant la Grande Chambre, eu égard spécialement à la déclaration de la Suisse lors de la ratification en date du 12 Octobre 2001 du Statut de Rome, aux termes de laquelle « Conformément à l'art. 103, par. 1 du Statut, la Suisse déclare être prête à prendre en charge l'exécution des peines privatives de liberté infligées par la Cour à des ressortissants suisses ou à des personnes ayant leur résidence habituelle en Suisse. », l'hypothétique influence de l'entrée en vigueur du Statut de Rome ( 1er Juillet 2002 ) sur la pénalisation du négationnisme.
Rien ne justifierait, à cet égard, que la Suisse puisse sanctionner le négationnisme d'un crime contre l'humanité établi par la Cour pénale internationale après le 1er Juillet 2002, date d'entrée en vigueur du Statut de Rome et soit empêchée de le faire pour un génocide, comme le Génocide Arménien, au seul motif qu'il a été perpétré antérieurement, bien que de tels crimes soient par nature imprescriptibles et que la décision-cadre ne renvoie pas à l'article 11 dudit Statut de Rome ( Compétence ratione temporis ).
Or, seule la Cour de justice de l'Union européenne est habilitée à apporter une réponse décisive à cette question cruciale nécessitant une interprétation authentique et faisant foi notamment de l'article 1er, § 1, sous c) de la décision-cadre du 28 Novembre 2008. Une telle solution opposable aux Etats membres de l'Union européenne serait applicable à la Suisse, membre de l'Association européenne de libre-échange ( A.E.L.E. ).
Il est patent, en tout état de cause, que les réponses de la Cour de Luxembourg aux questions préjudicielles susvisées seront déterminantes tant dans la transposition adéquate par chacun des vingt-huit Etats membres de l'Union européenne de la décision-cadre du 28 Novembre 2008 susmentionnée, que dans l'appréciation par la Grande Chambre de l'application par les juridictions suisses – notamment le Tribunal fédéral dans son arrêt du 12 Décembre 2007 – de l'article 261 bis du Code pénal suisse, qui ne laisse apparaître aucune violation de la Convention européenne des droits de l'homme ou de l'un de ses protocoles dont Dogu PERINCEK – compte tenu de son comportement constitutif d'un abus de droit manifeste prohibé par l'article 17 de la Convention - pourrait raisonnablement faire grief à la Suisse.
J'apprécierais, dès lors, que cette demande de décision préjudicielle trouve un écho favorable auprès du Gouvernement suisse.
Vous souhaitant bonne réception de la présente,
Je vous prie de croire, Monsieur l'Ambassadeur, en l'assurance de ma haute considération.
Philippe KRIKORIAN
PIECES
Accusé de réception du Greffe de la Cour de justice de l'Union européenne du 28 Mai 2014 attestant de l'enregistrement sous le n° C-243/14 de la « demande de décision préjudicielle » du 13 Mai 2014 ( deux cent dix pages ) - « Date de la décision de renvoi : 13/05/2014 » – « Date de dépôt au greffe de la Cour : 13/05/2014 »
Demande de tierce intervention en date du 16 Juin 2014 de Maître Philippe KRIKORIAN à Monsieur le Président de la Cour européenne des droits de l'homme ( soixante-sept pages ) ( renvoi de l'affaire PERINCEK c. SUISSE - n°27510/08 - devant la Grande Chambre - articles 36 § 2 de la Convention européenne des droits de l'homme et 44 § 3 du Règlement de la Cour européenne des droits de l'homme ).
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