EDITORIAL
Sciences Po : le prix du silence
par Ara Toranian
Le gagnant du concours recevra un prix de 1000 euros et sera invité à assister au Séminaire de l’Institut du Bosphore à Istanbul. Il pourra également visiter le bureau de la TUSIAD (patronat turc). Des prix de 500 euros seront attribués au deuxième et au troisième. La date limite pour rendre les copies est le 8 mars.
Ce n’est pas la première fois que l’école de la rue Saint Guillaume s’adonne à ce type d’opération visant faire la promotion de l’Etat turc auprès des élites françaises en formation. Déjà, en 2007, BNP Paribas avait déclaré vouloir œuvrer pour changer la mauvaise image de la Turquie en France, en ouvrant et finançant une section « Turquie » à l’Institut d’Etudes Politiques de Paris.
Pierre Mariani, membre du comité exécutif de la BNP, avait dit à ce propos le 7 juin 2007 dans le quotidien Radikal : « La Turquie est considérée par certains Français comme “le pays qui tue les pauvres Kurdes”. Vous ne méritez pas une telle image. Nous devons travailler ensemble pour changer cette image, pour vous faire connaître réellement aux Français qui vous connaissent mal. »
Consacrant des articles à cette forme d’instrumentalisation de Sciences Po par un Etat étranger (et pas des plus démocratiques), le Canard enchaîné avait dénoncé à l’époque « les turqueries de la BNP » tandis que France-Soir faisait sa « une » avec ce titre : « la Turquie s’offre Sciences Po ».
Au cours de cette réunion (qui avait draîné beaucoup d’étudiants et provoqué l’ire des partenaires pro-turcs de Sciences po), des militants des droits humains, des journalistes, et des acteurs de la société civile avaient dressé un tableau terrifiant du climat dans ce pays.
Avec ce concours, mis en place avec l’institut du Bosphore, la direction de Sciences Po affiche clairement sa volonté de rentrer dans les clous. Et aussi, peut-être, d’effacer le mauvais souvenir qu’avait laissé son incartade de septembre chez ses partenaires et généreux donateurs pro-turcs. Comment expliquer sinon l’absence de son cahier des charges de toute référence à l’actualité, et en particulier à la dérive des autorités turques et ses répercussions politico-économiques sur les relations du pays avec la France et l’Europe - problématique ô combien pertinente eu égard à la situation présente.
Faut-il le rappeler ? L’institut du Bosphore, financé par le patronat turc (La Tusiad), est l’un des principaux lobbys pro-Ankara en France. Le « prix » organisé par Sciences Po avec ce groupe de pression serait-il donc celui du « silence » sur les sujets qui fâchent ? Ou, « cas d’école » bien sûr, celui à payer pour rétablir quelque partenariat juteux à défaut d’être très « politiquement » corrects par les temps qui courent ? À suivre en tout cas...
Ara Toranian
dimanche 26 février 2017,
Ara ©armenews.com
http://www.armenews.com/article.php3?id_article=138300
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