lundi 20 mars 2017

"The Promise" Le film événement sur le Génocide des Arméniens

Le film sur le génocide arménien "The Promise" dans le collimateur d’internautes pro-turcs

Le film événement sur le Génocide des Arméniens "The Promise" sort aux USA le 21 avril, 3 jours avant le 102ème anniversaire de la grande catastrophe. C'est le testament de Kirk Kerkorian, ancien patron de la MGM, décédé pendant le tournage. On notera sur l'affiche officielle les codes couleurs du drapeau arménien. D'intenses pressions de la Turquie aux USA ont retardé sa distribution. Pas encore programmé en France.

a© Capture d'écran Youtube | L'acteur Oscar Isaac interprète Michael Boghosian, un étudiant en médecine d'origine arménienne

Texte par Sébastian SEIBT  

"The Promise" un film américain sur le génocide des Arméniens, qui n’est même pas encore sorti, fait déjà l'objet d’une campagne de dénigrement notamment sur Internet.

Le film américain “The Promise” n’est pas encore sorti en salle et n’a même pas encore de distributeur, mais il cumulait pourtant lundi 24 octobre près de 90 000 avis, dont la majorité négatifs, sur le site de référence cinématographique IMDB. Un record pour une œuvre qui n’a été montrée, jusqu’à présent, que trois fois lors de festivals. Même "Jurassic World", le film le plus rentable de 2015, n’a généré que 1 300 avis sur IMDB.

“Au lendemain de la première projection du film [au festival du film international de Toronto, en septembre 2016], il y avait déjà récolté 70 000 avis négatifs sur IMDB”, rappelle Mike Medavoy, coproducteur de “The Promise” au magazine américain Variety. Ce déluge de critiques visiblement fantaisistes a finalement eu raison de la patience de l’équipe du site, mardi 25 octobre, qui a fait un grand ménage pour ne garder qu’une vingtaine d’avis.

“Mensonges historiques éhontées”

“The Promise” aborde la question du génocide des Arméniens de 1915 à travers une histoire d’amour entre les personnages joués par Christian Bale, Oscar Isaac et la Française Charlotte Le Bon. Un sujet sensible s’il en est en Turquie. Ankara conteste depuis toujours le terme de génocide et déchaîne sa colère contre quiconque conteste la version officielle, selon laquelle il y a eu des massacres qui ont fait des victimes turques et arméniennes.

Le film du réalisateur irlandais Terry George, à qui l’on doit aussi “Hôtel Rwanda”, s’est ainsi retrouvé dans le collimateur d’une armée d’internautes qui soutiennent les autorités turques. Le ton des commentaires, que France 24 a pu consulter avant leur disparition, ne laisse guère planer le doute. Il n’est pas question de qualités cinématographiques mais, entre autres, de “mensonges historiques éhontés” et d’un long-métrage “financé par l’argent arménien pour nuire à la Turquie”.
L’œuvre est clairement militante. Elle résulte de la volonté de feu l’homme d’affaires d’origine arménienne Kirk Kerkorian, un ancien propriétaire du studio de la Metro-Goldwyn-Mayer, qui voulait porter à l’écran le génocide des Arméniens à la manière d’une grande fresque historique. Il a intégralement financé “The Promise” qui, avec un budget de plus 100 millions de dollars, est l’un des films indépendants les plus chers de l’histoire d’Hollywood.

Des “Quarante jours de Musa Dagh” à Atom Egoyan

Mais l’argent ne fait pas tout. L’œuvre n’a toujours pas de distributeur, malgré des premières critiques positives de la presse. Là encore, l’ombre d’Ankara plane au-dessus de l’avenir de “The Promise”. “Je dirais simplement que certains studios ont des intérêts en Turquie”, s’est borné à déclarer Eric Esrailian, un autre coproducteur du film, à Variety.

Ce n’est pas la première fois qu’Hollywood peine à sortir un film sur le génocide des Arméniens. Dans les années 1970, la MGM avait accepté de produire une adaptation du roman de Franz Werfel “Les quarante jours du Musa Dagh”, qui traite de cette question, avec Clark Gable dans le rôle principal. Mais le studio avait finalement renoncé, après avoir subi des pressions diplomatiques turques relayées par le Département d’État américain. Les droits du film ont été revendus et une version à petit budget, toujours disponible sur Youtube, a pu voir le jour en 1980.

Le réalisateur multi-décoré d’origine arménienne Atom Egoyan croyait avoir trouvé la solution, en 2002, avec le film "Ararat", qui met en scène un réalisateur cherchant en vain à faire un film sur le génocide des Arméniens. Erreur : le studio Miramax, qui avait endossé la responsabilité de distribuer "Ararat", avait reçu tellement de plaintes via Internet que son site avait dû être temporairement fermé.

Génocide arménien : protection policière pour des élus allemands d'origine turque

© Ozan Kose, AFP | Des Turcs protestent devant l'ambassade allemande à Istanbul contre la résolution reconnaissant le génocide arménien, le 4 juin 2016.

Onze jours après avoir voté en faveur d’une résolution reconnaissant le génocide arménien, des députés allemands d’origine turque ont été placés sous protection policière après avoir reçu des menaces de mort, a déclaré un élu dimanche.

La Turquie, terre de leurs ancêtres, leur semble brusquement moins accueillante. Onze élus du Bundestag (la chambre basse du Parlement allemand) d’origine turque ont été placés sous protection de la police, suite à la reconnaissance du génocide arménien par les députés, a déclaré un élu, dimanche 12 juin.

Deux jours plus tôt, les édiles s'étaient vu déconseiller de se rendre en Turquie par le ministère allemand des Affaires étrangères. Ils avaient reçu des menaces de mort en raison de leur décision de voter en faveur d’une résolution reconnaissant le génocide arménien, adoptée jeudi 2 juin.

Une situation insupportable pour Aydan Özouz, commissaire allemande à l’intégration : "C’est épouvantable de savoir qu’il n’est pas possible d’aller là-bas", s’est-elle émue au cours d’une interview au quotidien allemand.

>> À lire sur France 24 : "Mémoires vives", le webdoc de France 24 sur le génocide des Arméniens

Les menaces de mort contre les députés semblent faire écho aux déclarations incendiaires du président turc, Recep Tayyip Erdogan, qui avait taxé les parlementaires en question de "bras prolongés des terroristes", en allusion aux rebelles kurdes. Avant d’évoquer, le 8 juin, la nécessité de leur donner "la leçon qu'ils méritent".

"Appels au meurtre"

Le coprésident du groupe écologiste au Bundestag, Cem Özdemir, l’un des auteurs du texte, a dénoncé les propos du chef d’État turc, les qualifiant à demi-mot d’"appels au meurtre". "On n'a pas à trouver cette résolution bonne. (…) Mais les organisations turques doivent condamner sans équivoque les appels au meurtre."

Cem Özdemir et Aydan Özouz ont tous deux tenu bon, et placé leur citoyenneté allemande devant leurs origines turques. "Les votes du Parlement allemand ne dépendent pas de ce qui plaît ou ne plaît pas à un dirigeant autoritaire", a martelé le premier en faisant allusion aux dérives de Recep Tayyip Erdogan. "Il ne faut pas faire de confusion, a quant à elle prévenu Aydan Özouz : je suis députée pour les gens d'ici. Je ne fais pas de politique pour la population turque."

Un million et demi de victimes

Outre ces menaces, Cem Özdemir a également subi un rejet symbolique : selon les Nouvelles d’Arménie, il pourrait perdre le titre de citoyen d’honneur de la ville natale de son père, Pazar, dans la province turque du nord de Tokat. "Nous ne reconnaissons pas la décision du Parlement allemand sur la résolution", a déclaré le maire de la ville, Şerafettin Pervanlar, qui compterait offrir à la place le titre honorifique à l’unique députée allemande à s’être opposé au texte, Bettina Kudla.

Alors que nombre d'historiens et plus de vingt pays, dont la France, l'Italie et la Russie ont reconnu que près d’un million et demi d’Arméniens ont été victime d’un génocide de la part de l’armée ottomane au début du XXe siècle, la Turquie n'a cessé de rejeter ces accusations. Ankara considère ces événements tragiques comme une guerre civile doublée d'une famine, au cours de laquelle 300 000 à 500 000 Arméniens et autant de Turcs ont trouvé la mort.

© Odd Andersen, AFP | Les députés allemands lors du vote sur la résolution concernant le génocide arménien, le 2 juin 2016.

Le Bundestag reconnaît le génocide arménien, Ankara rappelle son ambassadeur

aLes 630 députés du Bundestag ont adopté jeudi une résolution parlementaire reconnaissant le génocide des Arméniens par les forces ottomanes en 1915. En représailles, la Turquie a rappelé son ambassadeur en Allemagne.

Le Bundestag, la chambre basse du Parlement allemand, a voté jeudi 2 juin à une majorité écrasante une résolution reconnaissant le génocide des Arméniens par les forces ottomanes en 1915, un texte vivement combattu par Ankara.

Seul un député a voté contre et un autre s'est abstenu lors du vote, a annoncé le président de la chambre basse, le conservateur Norbert Lammert. Le vote ayant eu lieu à main levée, les voix en faveur du texte n'ont pas été décomptées.

En représailles, la Turquie a rappelé son ambassadeur en Allemagne. En déplacement à Nairobi, le président turc Recep Tayyip Erdogan a estimé que le vote des députés allemands allait "considérablement affecter" les relations entre les deux pays.

Merkel absente lors vote

Dans le texte intitulé "Souvenir et commémoration du génocide des Arméniens et d'autres minorités chrétiennes il y a 101 ans", le Bundestag "déplore les actes commis par le gouvernement Jeunes Turcs de l'époque, qui ont conduit à l'extermination quasi totale des Arméniens". Il reconnaît aussi "le rôle déplorable du Reich allemand qui, en tant que principal allié militaire de l'empire ottoman (...) n'a rien entrepris pour stopper ce crime contre l'Humanité".

"Le sort des Arméniens est exemplaire dans l'histoire des exterminations de masse, du nettoyage ethnique, des déportations, et oui, des génocides qui ont marqué le XXe siècle de terrible façon", lit-on dans le texte de la déclaration.

Côté gouvernement allemand, Angela Merkel n'a pas participé au vote en raison d'autres obligations, mais elle a soutenu le texte lors d'un scrutin test mardi au sein du groupe parlementaire conservateur, selon une porte-parole, Christiane Wirtz.

Toujours est-il que le moment du vote de cette résolution est malvenu pour la chancelière, qui joue son avenir politique sur l'accord conclu en mars avec la Turquie par lequel Ankara a accepté d'endiguer le flot de migrants arrivant en Europe en échange d'avantages divers, en matière de visas notamment, et de l'accélération des discussions sur l'entrée de la Turquie dans l'UE.

"Ne pas se laisser impressionner par la Turquie"

La Turquie, qui estime que la mort de 1,5 million d'Arméniens en 1915-1916 sur son territoire actuel "n'est pas un génocide", avait déjà haussé le ton contre l’Allemagne, où vit une importante communauté turque. Mardi, le président Erdogan avait téléphoné à la chancelière Angela Merkel pour lui faire part de ses "inquiétudes". Mercredi, son Premier ministre, Binali Yildirim, avait estimé que le vote constituerait "un véritable test de l'amitié" entre Ankara et Berlin.

Dans une interview au quotidien allemand Bild mercredi, le président arménien Serge Sarkissian avait lui encouragé les députés allemands à ne pas se laisser "intimider" par la Turquie.

"Ce ne serait pas juste de ne pas nommer génocide le génocide des Arméniens uniquement parce que cela met en colère le chef d'État d'un autre pays", a déclaré M. Sarkissian, en référence au président turc. Selon lui, l'accord sur les migrants conclu avec l'Union européenne, sera de toute façon "difficile à appliquer dans la durée avec un partenaire comme la Turquie".

L'an dernier, quand l'Autriche a voté une déclaration de reconnaissance du génocide arménien, la Turquie avait rappelé son ambassadeur à Vienne et évoqué "des effets négatifs permanents" dans les relations diplomatiques entre les deux pays.

Plus de 20 pays, dont la France par la loi du 29 janvier 2001, ont reconnu le génocide des Arméniens, suscitant la colère de la Turquie, qui nie toujours l'organisation d'une campagne pour leur élimination systématique.

Avec AFP et Reuters

Première publication : 02/06/2016

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