http://www.collectifvan.org/article.php?r=0&id=99648
Le Congrès devrait enquêter sur les prêts américains accordés à Silk Way Airlines, opaque compagnie aérienne azérie
De Harut Sassounian
The California Courier
www.TheCaliforniaCourier.com
Éditorial du 6 septembre 2018
L’an dernier, j’ai écrit un article expliquant qu’entre 2014 et 2017, la compagnieaérienne de l’Azerbaïdjan, Silk Way Airline, a effectué 350 vols secrets pour transporter des centaines de tonnes d’armes de Bulgarie en Syrie et dans d’autres pays du Moyen-Orient, destinées aux terroristes de Daech.
Une révélation surprenante nous apprend maintenant que Silk Way Airlines a reçu 419,5 millions de dollars de prêts de la banque américaine Export-Import Bank (EXIM) pour l’achat de trois avions de fret Boeing 747-8, afin de poursuivre ses sinistres opérations.
Cette divulgation a été faite par un journaliste du Projet d’investigation sur le crime organisé et la corruption (OCCRP) qui a déposé une requête en vertu de la loi d’accès à l’information (FOIA) auprès du gouvernement américain en 2016. Il convient de noter que Silk Way Airlines « détenue par une compagnie qui était liée à la famille Aliyev en Azerbaïdjan, a remporté des contrats lucratifs avec l’armée américaine », selon les documents de la FOIA.
De fait, selon Devansh Mehta de l’OCCRP, « Silk Way a obtenu pendant plus de dix ans des contrats d’une valeur de plus de 400 millions de dollars avec le Commandement des Transports du Département américain de la Défense. » Silk Way a transporté « des munitions et autre matériel non létal » en Afghanistan dès 2005. « Outre sa relation avec le gouvernement américain, Silk Way a également travaillé avec le Département canadien de la Défense, les forces armées allemandes et l’armée française », a révélé Mehta.
En avril 2017, selon le journaliste Mehta, Silk Way a accru ses achats de Boeing, en signant un contrat d’un milliard de dollars pour dix nouveaux avions civils, 737 MAX. Toutefois, on ignore comment cette nouvelle acquisition a été financée. En octobre dernier, Silk Way a annoncé un plan d’achat de deux nouveaux avions de fret, 747-8.
Mehta a révélé que « la compagnie aérienne est détenue par le Silk Way Group, qui, à un certain moment au moins, a été étroitement associé avec la famille Aliyev au pouvoir en Azerbaïdjan (qui a utilisé ses avions pour des voyages privés) et a bénéficié de généreux marchés publics. Les informations obtenues via la FOIA montrent que la compagnie aérienne Silk Way a pris des mesures pour dissimuler l’identité de ses propriétaires, peut-être pour améliorer ses chances de gagner les précieuses garanties de prêts américains et les contrats militaires. »
Mehta a ajouté que « L’Azerbaïdjan est au 122e rang sur 188 pays dans l’index de perception de la corruption de Transparency International, tandis que la famille du président Ilham Aliyev possède des propriétés luxueuses dans le monde, d’une valeur de plus de 140 millions de dollars. Les Panama Papers et d’autres fuites ont mis en cause la première famille du pays qui est impliquée dans presque tous les secteurs de l’économie azérie, des hôtels de luxe, en passant par les mines et les banques. »
Selon les termes et conditions du prêt de 419,5 millions de dollars que Export-Import Bank a accordé à Silk Way, en cas d’insolvabilité, la perte serait payée par la banque détenue par l’État, International Bank of Azerbaïdjan (IBA). Le problème est que l’IBA a été « impliquée dans la lessiveuse azérie, une tactique massive qui a sorti près de 3 milliards de dollars du pays, via diverses compagnies opaques », écrit Mehta. De plus, l’IBA n’est pas en position de garantir le prêt de Silk Way, car IBA s’est déclarée en faillite en 2015, étant incapable de payer sa dette de 3,3 milliards de dollars !
Nate Schenkkan, le directeur du projet Nations in Transit chez Freedom House, une ONG américaine qui observe la démocratie et les droits de l’homme dans le monde, s'est interrogé sur le bien-fondé du prêt de la banque EXIM à Silk Way : « En Azerbaïdjan, où une famille domine économiquement et politiquement, et utilise les institutions publiques pour appuyer ses projets économiques, il existe un conflit d’intérêt manifeste.
Arzu Aliyeva, la fille du président Aliyev, âgée de 21 ans, était l’un des trois propriétaires de la Silk Way Bank, l’arme financière de Silk Way Holding. Depuis 2017, son nom n’est plus mentionné en tant que propriétaire. « Silk Way Holding, également appelé Silk Way Group (SW Group) sur son site, est un conglomérat qui affiche 11 entreprises dans son portfolio, y compris la compagnie aérienne », selon Mehta.
Silk Way Holding a dominé le secteur de l’aviation en Azerbaïdjan après que le transporteur AZAL Airlines a été privatisé d’une façon très opaque sans aucun appel d’offre. Mehta a écrit que « Une privatisation similaire du secteur de la télécommunication s’est terminée avec un gain pour la famille Aliyev d’environ un milliard de dollars de pots-de-vin en liquide et en actions en bourse, selon un article précédent de l’OCCRP. L’enquête a aussi découvert que l’argent a été transmis à la première famille du pays via diverses sociétés offshores. Ces dernières ont permis aux Aliyev de prendre le contrôle des parts pour les mines d’or, les télécommunications et le secteur de la construction en Azerbaïdjan. »
Selon une déclaration datant de 2006, Silk Way Airlines a déclaré être détenue par IHC (International Handling Company), une société offshore basée dans les Îles Vierges britanniques. Dans une déclaration de 2017, Silk Way a déclaré que 40 % de la compagnie étaient détenus par IHC, et 60 % par la SW Holding, « efficacement contrôlés » par Zaur Akhundov, un citoyen azéri. Mehta a dit que « l’IHC est lié à la famille Aliyev via son directeur Jaouad Dbila qui aurait servi de mandataire pour défendre les intérêts commerciaux de la famille Aliyev dans le passé. »
En 2011, Grigory Yurkov, un directeur né en Russie, a été mandaté pour Silk Way Holding et IHC, selon la gazette officielle du Luxembourg. Cette nomination a été utilisée comme moyen pour dissimuler les vrais propriétaires d’IHC.
Entre-temps, en 2014, Zaur Akhundov est mystérieusement devenu le propriétaire à 100°% du Silk Way Group. À cette époque-là, la compagnie et ses nombreuses holdings valaient déjà des milliards de dollars, a déclaré Mehta, en se basant sur la demande de garantie de prêt de la compagnie. Akhundov, 50 ans, a occupé plusieurs postes officiels en Azerbaïdjan. « On ne sait pas clairement comment Akhundov est devenu le propriétaire d’un conglomérat valant un milliard de dollars, avec plus de dix avions, une compagnie d’assurance, une entreprise de construction et une entreprise de maintenance d’avions, pour ne citer que quelques entreprises du Silk Way Group », s’est demandé Mehta.
Selon Schenkkan de Freedom House, « L’Azerbaïdjan peut être décrit comme une pyramide verticale et centralisée où les bénéfices vont à une seule famille qui perçoit des loyers de toute l’économie. Ceci inclut toutes sortes de transactions, non seulement des transactions publiques qui peuvent comprendre des impôts et des fonds publics, mais aussi des choses qui impliquent ce que l’on considère normalement comme relevant du secteur privé : l’import-export, les biens de consommation, le transport – tous les secteurs de l’économie dans lesquels la famille a des parts et reçoit un pourcentage sur ce qui a lieu. »
Le Congrès américain devrait tenir une audience pour déterminer le bien-fondé de la garantie de prêt de 419,5 millions de dollars, accordée par la banque EXIM à Silk Way Airlines, sur ses livraisons d’armes aux groupes terroristes au Moyen-Orient et sur le fait qu’elle est détenue par la famille Aliyev. Après tout, pourquoi l’Azerbaïdjan, un pays qui possède des milliards de pétrodollars, devrait obtenir un prêt des États-Unis ?
©Traduction de l’anglais C.Gardon pour le Collectif VAN – 6 septembre 2018 – www.collectifvan.org
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire
Quelques lignes signalant votre passage me feront toujours plaisirs. Si vous n'avez pas de blog, vous pouvez néanmoins poster un commentaire en cliquant sur "Anonyme" et signer de votre nom ou un avatar. Amicalement,
Dzovinar