Dzovinar - (feutres)
Je me souviens de cet été
de mon enfance, où mes parents
confièrent, le temps des vacances,
le soin de mon corps et de mon âme,
aux religieuses arméniennes d'un couvent
qui officiaient dans un pavillon de banlieue
du côté d'Arnouville lès Gonesse.
Ces femmes douces et bonnes
veillaient sur une vingtaine
de fillettes de mon âge, mes compagnes.
Les journées se passaient en travaux de couture,
dans le dortoir, souvent en jeux dans une cour exigüe
poursuivis jusque dans les couloirs !
Nous ne sortions guère.
Un matin, à ma grande surprise,
la soeur supérieure vint me chercher
- où est-ce qu'on va ?
- Tu verras bien dit-elle brièvement
Elle ajouta quand même avec un petit sourire :
- n'as-tu pas dit, hier, que tu t'ennuyais ?
C'était vrai : on lui avait rapporté ma plainte.
Nulle gronderie dans sa voix ;
pourtant je me sentis confuse.
Je leur faisais de la peine puisque les
bons soins de ces femmes tendres et dévouées
ne parvenaient pas à me rendre heureuse.
Alors, je l'accompagnai pour ses emplettes ;
nous longions des champs envahis d'insolents
coquelicots paradant dans leur robe d'éclatant rubis.
J'en cueillis quelques uns, encore en boutons,
car le plaisir suprême consisterait à ouvrir
avec délicatesse les coques vert tendre et à déployer,
avec d'infinies précautions, pour ne pas les blesser,
et les garder intactes, leurs parures fines et soyeuses
comme des paupières.
Dzovinar 2009
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire
Quelques lignes signalant votre passage me feront toujours plaisirs. Si vous n'avez pas de blog, vous pouvez néanmoins poster un commentaire en cliquant sur "Anonyme" et signer de votre nom ou un avatar. Amicalement,
Dzovinar